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Final Fantasy

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Angie, episode Geostigma

Darkangel Guard

Résumé : Je n\'étais qu\'une gosse de riche sans importance, et du jour au lendemain, je me retrouve projetée sans défense sur Gaïa, sauvée in extremis par cet énergumène énervant qu\'est Vincent Valentine. Outre le fait que j\'ignore la raison de ma présence ici, Geostigma a envahi la planète et possédé les monstres, et quelque chose me dit que je vais devoir y faire quelque chose...quand il est évident que je ne sais rien faire. Je ne maîtrise pas mes pouvoirs, et je vais *probablement* mourir avant d\'y arriver, je le dis. \"Je te protégerai.\" dit Vincent...mais la vérité est qu\'on ne se supporte pas. Dystopie.Post Advent Children. VincentxOC

Disclaimer : L\'univers de Final Fantasy appartient de droit Ă  Square Enix Corporation.

Hello les gens. Comment allez-vous ? Oui… Je sais. Je suis en retard. Mais ! Tout sera expliqué à la note de fin (et qui sait ? Sa qualité j’espère). Cette fic est un véritable chantier à l’heure qu’il est, mais je pense dur comme fer que la qualité prime sur toutes les autres raisons. Qui plus est, entre chercher un travail dans les temps qui court, commencer mes livres et la réécriture de Angie, c’était très compliqué. En ce qui concerne mes autres fics, je me sentirai de publier quand j’aurais trouvé des bêtas, déjà. Il n’y a pas à dire que j’ai grandement gagné en qualité depuis. Déjà, j’ai arrêté de descendre les échelles. Hein Full ? Haha ! Checkez les chapitres jusqu’au 6 les gens ! C’était un véritable plaisir et ça y est, pour moi la réécriture est enfin derrière moi concernant ces chapitres ! Le 7 est donc en cours ^^. Comme toujours, merci à Eclipse et Full1 pour leur avis et la correction et sans qui ce chapitre n’aurait peut-être jamais vu le jour (oui, c'est à quel point j'ai pas confiance et j'ai peur XD). Il n’y a pas eu beaucoup de votes mais tous ont été pris en compte. Si vous souhaitez voter même maintenant, vous pouvez et je le ferai dans les prochains chapitres si vous aimez le format ! Biiiiiiz !

Chapitre 23 :: De l'autre côté du miroir

Vincent (Music : Surrender de Assassination Nation)

Lucrécia…
-Vincent, appela-t-elle en arrĂŞtant les notes.
J’ouvris les yeux et me redressai quelque peu, enlevant mon appui du piano où reposait mon coude. Mon regard se posa diligemment sur elle, cachant à la va-vite derrière mon col les pensées qui me taraudaient une seconde plus tôt.
-Assieds-toi donc ici, demande Angelina avec une certaine autorité en posant doucement sa main sur son siège à sa gauche.
…Il n’y avait guère de place sur le siège. Je pouvais rester debout longtemps si c’était pour l’écouter. Il n’était vraiment pas nécessaire de – son regard indéfectible me dissuadait de protester.
En m’approchant, faisant le tour de son siège, elle glissa pour me laisser de la place. Lorsque je m’assis prudemment, incertain, je finis comme je m’y préparais par la rattraper brusquement, la retenant d’un bras avant qu’elle ne tombe. Elle rit ouvertement, sa main sur la mienne autour de son buste, une jambe qu’elle avait lancée sur le côté pour se rattraper.
-Faut pas être trop gros, hum, lança-t-elle sur un ton plaisantin. Ah, laisse tomber, tu ne connais probablement pas non plus cette référence, poursuit-elle avec nonchalance en haussant une épaule. Tant de choses à t’apprendre !
Et en souriant tranquillement. Malgré ses heures passées à l’intérieur, je ne pouvais m’empêcher de penser combien son teint et son sourire étaient rayonnants. Et…elle semblait à l’aise en ma présence. Plus ouverte avec moi qu’avec les autres… Je me risquai alors à penser que peut-être… Non.

-Bien, j’ai une fesse à l’extérieur, mais cela devrait faire l’affaire. Enlève ton gant et donne-moi ta main. La musique est beaucoup mieux quand on sait de quoi elle est faite.
Je l’écoutai avant de lui présenter ma main, un peu confus au sujet de comment nous allions bien pouvoir procéder sans ma main gauche, ou même à trois mains.
Je me rappelai alors le piano du manoir, et combien les nombreuses touches me donnaient déjà le vertige. La voix de Lucrécia, alors qu’elle disait : « Il est beau n’est-ce pas ? Il faudrait que j’apprenne à en jouer un jour. Ah…tellement de travail. ». Le piano était massif, noir, avec un son ample et affirmé, des extrêmes prononcés…ses basses lugubres allaient à merveille avec –
Elle s’empare de ma main.
-Concentre-toi, c’est très simple.
Après avoir repéré les premières notes, ses cheveux blonds reflétant la lumière à la commissure de ma vue attirèrent mon attention. Sentant probablement mon regard, elle me dévisagea aussi avant de sourire de façon encourageante. Puis son doigt sur le mien, elle appuya sur une touche de façon insistante, me rappelant à la tâche, un léger rire tintant dans la pièce.
Ses mains étaient toujours fraîches, ou froides. Mais bienvenues. Sa main gauche libre se plaça dans mon dos avec la légèreté d’un oiseau, comme une façon de rappeler sa présence et de dire que tout irait bien. Elle observa mon expression avec attention. Ses sourires étaient un peu forcés, mais ils étaient pleins de bonnes intentions. Alors je m’appliquai.

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(Music : Trail of Blood de Final Fantasy VII cover par Patti Rudisill)

Elle s’effondre dans une exclamation étranglée de douleur des plus atroces. « Angie ! » Je la prends sur mes jambes pliées, soutenant sa tête. « Angie ! » Ses yeux sont vitreux et hagards. Je peine à la maintenir.
« Vin – ! » Elle s’arque de douleur en tenant son bras, grognant et hurlant de façon si horrifiante qu’il hantera mon esprit longtemps. Du Lifestream noire court sur sa peau depuis son bras droit. Sa voix est si forte à mes oreilles concentrées qu’elle perce mes tympans.
Sa respiration est précipitée, ses extrémités tremblent, sa peau glacée est parcourue de frissons. « Je suis là ! » Prêt à faire tout ce qu’il faut. Mais c’est comme si elle ne m’entendait déjà plus. Je savais que c’était une mauvaise idée, je le savais, mais comme toujours il a fallu que je la laisse n’en faire qu’à sa guise.
Elle se met à convulser violemment, nos yeux se remplissent d’effroi – d’un geste du bras j’empêche tout le monde de s’approcher sans sommation. Elle rejette la tête en arrière – maintenant elle peine clairement à respirer, et je suis agacé par le fait que nos pulsations rendues paniquées par la scène noient presque les siennes devenues erratiques.
Elle a l’air de s’étouffer, s’étrangler, comme si elle se noyait, je la force à se redresser dans mes bras – elle crache une gerbe de sang sombre qui macule aussitôt sa gorge blanche et mon visage.

Une part de moi sait déjà. Une part de moi voit de ses propres yeux que ce n’est pas quelque chose dont elle reviendra cette fois.
-An…Angie ! Angie prends mon Énergie !
Je sens vaguement mon Énergie me quitter. Trop peu, trop lentement. Du sang continue de couler sur son menton. Elle peine à respirer. Alors je la place sur le flanc et plonge un doigt dans sa bouche pour maintenir sa langue et dégager ses voies. Du sang se fraie un passage, macule ma main, tâche le sol.
Ses mains lâchent mon poignet. Elle tourne de l’œil. Et m’abandonne.

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(Music : Another World of Beasts / Esper World de Final Fantasy VI cover par Patti Rudisill & Co)

Je suis accroché au téléphone, ma main gauche fermement placée sur son buste au niveau du cœur. Je ne sens pas les Énergies comme elle sans l’aide de Chaos, mais mon instinct, peut-être même lui, m’indiquent que c’est l’organe que je dois préserver à n’importe quel prix.
-C’est une forme extrêmement virulente de Geostigma. Perfectionnée, je dirais même, avec du Lifestream corrompu. C’est exactement comme ce que nous avons vu en personne : un vrai poison. Il nous aurait fallu des prélèvements antérieurs pour savoir si elle était effectivement immunisée. Et si c’est son action qui l’a fait entrer dans son système, ce qui a involontairement aidé le virus à pénétrer ses défenses. Une sorte de barrière qui recouvre ses cellules et tous ses tissus, la surface de sa peau et même ses tissus morts comme ses cheveux et ses ongles, et ce de façon uniforme. C’est peut-être dû à sa condition de Cetra, ou c’est sa Rivière de la vie, son Lifestream d’Ancienne qui la protège.
-…Probablement.
-Nous allons voir combien de temps ces prélèvements vont bénéficier de son immunité et soumis à quelles conditions, afin de chercher comment l’aider, peut-être même un remède pour elle ou pour tous. Mais…Vincent. À toi plus que quiconque…je te dois la vérité, n’est-ce pas…
-Dis-moi.
-Le virus est déjà partout. Son sang. Ses organes. …Tout est en train de lâcher.
Si j’étais debout, nul doute que j’aurais chancelé à ce moment-là, le souffle coupé. J’ai un vertige effroyable.
Je ferme les yeux, retenant à grande peine un souffle douloureux dans mon torse pour qu’il ne soit pas entendu à l’autre bout du fil. Ma gorge se referme sur elle-même, me rendant la parole impossible.
-Ce n’est pas à dire que son corps ne lutte pas. Elle essaie clairement de le rejeter, ses cellules essaient de faire leur travail même si elles se font désintégrer à vitesse grand V. Mais…nous n’avons pas seulement détecté du Geostigma et du Lifestream corrompu dans ce qu’elle vomit, il y aussi des traces du Lifestream d’Angelina et de grandes quantités de sang.

Ma vue se trouble sur son corps étendu inerte dans la pénombre du sous-sol, respirant à peine. Ses veines noires et ses vaisseaux violacés apparaissent sans mal à travers sa peau pâle comme la mort. Elle est déjà partie, en un sens. Je serre les dents pour qu’aucun son ne soit entendu.
-À la cadence à laquelle elle recrache tout liquide aussitôt que son corps en a à disposition…sa perte risque d’être symptomatique. Elle va complètement se déshydrater avant que son corps n’ait le temps de renverser la vapeur et rejeter toutes les impuretés.
-…L’intraveineuse n’est donc pas suffisante ?
-Pas…selon nos actuelles observations.
Un souffle interrompu m’échappe. Je peux sentir une main qui s’est emparée de mon cœur pour le faire éclater en son sein. Je sais ce qu’elle essaie de me dire. Il n’y a pas de bonne façon de l’annoncer. Elle est déjà si précautionneuse avec moi depuis la disparition d’Angie sur Terre déjà.
-…Combien de temps ?
-Les prochains jours seront cruciaux…mais à priori, deux.
Deux. Un chiffre que je refuserai d’entendre, que je maudirai jusqu’à la fin de mon existence s’il s’avère vrai. Je coupe la ligne. Ma vue se reconcentre sur elle, enviant ne serait-ce que l’acuité visuelle de Cloud pour les Énergies.
-Le Dieu-cerf était en colère, fou et confus, cherchant sa tête frénétiquement dans tous les recoins, quitte à tout détruire sur son passage. Tout mourrait au contact des impuretés autour d’eux. Ils étaient encerclés ! Mais l’eau jusqu’aux hanches au milieu du lac, elle a dit une chose qui m’a marquée : tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ! s’exclame-t-elle avant de rire de façon malicieuse. C’est puissant comme vérité, n’est-ce pas ?

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Elle se tourna vers moi, l’air soudainement piquée.
-Tu penses trop, disait-elle sévèrement en désignant mon front. Tu es très cérébral, alors tu peux rester solitaire et silencieux, mais il faut t’occuper l’esprit. À des choses reposantes ou amusantes si possible. Je comprends que ce que nous faisons ou discutons puisse te mettre en sous-régime parce que tu es vif d’esprit, mais cela n’autorise pas à se laisser aller.
Ensuite elle posa les yeux ailleurs en croisant les bras, posément appuyée contre une console d’une hanche sans rien toucher, les chevilles croisées. Quand elle était en repos, elle semblait apprécier les talons, et ces derniers lui donnaient une belle ligne plus que les centimètres qu’elle semblait tant vouloir combler. Elle était d’une élégance sans pareille, comme si chaque geste avait été durement observé, étudié et répété pour atteindre cette grâce orchestrée que l’on retrouve même dans son style de danse et de combat.
Je hausse les sourcils, quelque peu pris de court. Elle finit par soupirer en croisant les bras.
-Je sais ce que c’est.
Je clignai des yeux.
-Les idées noires, tu sais. Je n’ai pas vécu la même chose que toi bien sûr mais… Moi, le piano, la danse…
Elle secoua la tĂŞte.
-Mon emploi du temps en devenait infernal, mais sans cela, je me serais enfoncée trop loin. Juste avant d’arriver sur Gaïa, tu sais – …
Elle ne poursuivit pas. Elle posa seulement sa paume sur ma greffe, mes bras croisés sur ma poitrine.
-Tu peux nous toiser tranquillement depuis ton coin, mais ne t’en va pas trop loin. Il y a des endroits où si tu ne nous laisses pas…nous ne pouvons pas te suivre. Je ne pourrai pas te suivre.
Je l’observai curieusement, un papillon heurtant les recoins de mon cœur où il était enfermé.
-Je vais jouer un peu, lança-t-elle alors.
Je la suivis comme une ombre vers la salle de musique. Ses talons résonnaient sur le métal du vaisseau, sa jupe se balançant d’un bon rythme sur ses jambes fines et galbées. Elle me pointa soudainement du doigt, toute douceur envolée.
-Tu peux venir, cependant si tu continues de faire cette tête quand je joue, j’arrête de jouer, menace-t-elle très sérieusement. Je n’aime pas prévoir mon répertoire à l’avance, informe-t-elle de façon tout à fait suffisante, ni déplaire à mon auditoire, et tu ne sembles aimer que les musiques tristes.
Elle me glissa un sourire taquin pour la finition.

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-S’il te plaît, fais que ça s’arrête…
Je ne sens le goût du sang dans ma bouche que lorsque je réalise que j’avais mordu l’intérieur de ma joue. Je sens mon bras gauche bouger lorsqu’Angelina est à nouveau secouée de soubresauts causés par de violents cauchemars. Non… Je la sens filer, inéluctablement, entre mes doigts impuissants. Quand est-ce que de l’entêtement se transforme en acharnement ? Avait-elle vraiment émis une volonté des plus profondes ? Suis-je en train de prolonger ses souffrances ? La réalité est-elle déjà à mes portes ?
-Je vais poursuivre l’expérience. Il le faut !
-Lucrécia…
Impuissant.
Je pourrais combattre la planète entière. La fatigue, sa maladie. Mais s’il y avait une chose que nos antécédents m’avaient prouvé, c’est que je ne pouvais l’affronter et vaincre à la fois.

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Elle souffre, mais elle se bat. Elle a dépassé ces deux jours il y a un moment. Elle défie nos pronostics comme j’espérais qu’elle le fasse. Les Cetras sont des créateurs de vie. Que Gaïa les abandonne si facilement n’a pas de sens. Moi…je tiendrai le temps qu’il faudra. Je sais qu’elle déteste par-dessus tout ce qu’elle est en train de vivre, mais ce n’est qu’une mauvaise passe. Le plus important est qu’elle se remette. Et elle se remettra.
-Ça va aller… J’arriverai à terme. Tout ira bien, Lucrécia insiste. J’en suis sûre. Il le faut.

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-Où est passée ta détermination ? Tu ne penses sérieusement pas à laisser tomber ? Quand bien même nous sommes là ?
Elle se ferme comme une coquille, les larmes aux yeux, ses mains serrant les couvertures si fort qu’elles en tremblent et blanchissent.
-…Je suis là ?
Je l’observe. Observe la moindre réaction qui trahirait ses pensées, montrerait qu’elle a compris le message. Mais…peut-être suis-je à nouveau trop démonstratif sur ma colère, la frustration qu’ont provoqué ses actions et leurs conséquences quasi-irrémédiables plutôt que le soulagement de la savoir encore là. Je prends sa main dans ma paume sans détour, doucement pour ne pas la pousser encore plus à la défensive.
-Justement parce que tu es lĂ .
…Nous avons déjà eu cette discussion. Je dois rester calme. Elle ne pense qu’à bien. Me constater ainsi lui cause de toute évidence du tort. Qui suis-je pour le lui reprocher ?
-Après tout ce que tu as vécu, sauver quelqu’un d’autre, faire le bien…était la seule chose qui pouvait donner un sens à ta vie. Pas vrai ?
…Peut-être. Peut-être bien, mais…
-Ce que j’ai réussi à faire, c’est au moins sauver Felicia.
Je voulais aussi sauver Felicia. Mais nous avions discuté de l’éventualité d’un tel scénario. Felicia était prête à mourir. Felicia a embrassé son rôle de son plein gré. Pas toi. Pas moi !
-Toi plus que quiconque, tu mérites d’être sauvé.
…Moi ? Moi ?
N’y tenant plus, je quitte la pièce. Maintenant…maintenant je ne devais plus seulement combattre Angelina. Je devais l’affronter contre elle-même. Je croyais qu’elle n’abandonnait jamais. Je serre les poings. Elle m’a menti. Elle m’a menti sur toute la ligne pendant qu’elle me faisait promettre de ne pas abandonner. Ni elle, ni moi, ni Gaïa ! Depuis quand es-tu si veule ?
Une douleur sourde me prend Ă  la poitrine. Comme un coup de feu. Vif et insoutenable.

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Un combat. Encore.
-Vincent ! elle s’écrie, avec l’énergie de la Angie tout feu tout flamme que je connais bien.
Mon soulagement est de courte durée lorsque je vois les contours de sa silhouette pulser d’une lueur turquoise. Je réagis presque par réflexe.
-Reste c –
Elle se braque, un bras devant elle pour se protéger, relâchant un sanglot de crainte. Je me fige, mes yeux fixés sur elle. …Jamais encore elle n’avait réagi ainsi. Ni à personne, ni à mon approche. Angie croise les bras et affronte toute menace. Elle ne courbe jamais l’échine.
Je crois que c’est le vrai moment où j’ai enfin accepté d’admettre que celle que j’ai en face de moi n’est pas celle que j’ai appris à connaître ces derniers mois. Celle que je vois…est dirigée par la peur sans parvenir à la surmonter.
Ou bien…ou bien elle réalise enfin le monstre que je suis. Elle réalise enfin à qui elle fait face.

Une partie de moi s’effrite en morceaux. Une partie vitale. Je crois…que c’était l’illusion qu’elle me faisait confiance. Évidemment…évidemment que cela n’avait aucun sens.
Une étoile filante s’écrase comme un satellite sur le champ de bataille. Avec elle, l’espoir qu’elle représente m’éblouit. Il n’y a pas seulement d’autres Cetras, mais ils sont là, à portée, et conscients de la situation – prêts à intervenir. C’est plus que nous ne méritons.
Nous allons pouvoir sauver Angelina.

…

Bon sang.
Mes pieds bien campés sur le toit d’une résidence de Costa, je porte la cape à mon nez pour pouvoir reconnaître son odeur en toute éventualité. Un homme, cela ne fait aucun doute. Sain et bien portant. Peu de transpiration. Donc habitué aux efforts.
Aucune personne ne remonte à ma mémoire, mais j’identifie une note presque imperceptible que je retrouve aussi chez Angelina. Peut-être simplement l’odeur qui dénote les Cetras. À part les fleurs entêtantes et les herbes fraîches soufflées par des alizés venteux, je n’arrive pas à me souvenir d’une note similaire mais lointaine chez Aerith. J’avais toujours trouvé son parfum naturel différent mais l’avais attribué à sa propre personne, et ne m’étais pas concentré sur la question plus longtemps. Je n’ai donc pas d’autre comparaison.
-C’est bon ? questionne Cloud.
Je scrute la cape, la tournant avec minutie entre mes mains pour l’observer. La couture est différente, simple mais efficace, et manuelle. Le noir est profond, le tissu épais et protecteur, la couleur imprégnée de façon artisanale.
-Si je croise ne serait-ce qu’un effluve, je serai capable de le reconnaître n’importe où, je confirme. Je vais suivre sa trace avec Tifa.
Je m’arrête lorsque je trouve deux cheveux clairs éparpillés sur le col de la capuche au niveau de la nuque. Je les prends entre mes doigts discrètement, les enlevant du fond noir de la cape pour en avoir le cœur net. Ce n’est pas argenté…mais c’est un blond familier. Mes yeux font le point, détaillant avec précision la fibre capillaire. La brillance, la texture sont similaires. La longueur est la même.
-Notre inconnu de UtaĂŻ, disait Angelina Ă  Gold Saucer.
Peut-ĂŞtre bien.

Mais quelque chose d’autre m’interpelle.
Je le reporte à mon nez pour faire un rappel de ce que je venais de mettre en mémoire et m’assurer de ne rien manquer. Une chance. En me concentrant sur chaque note, je remarque un détail important : il n’est pas seul. Un autre homme – non, plus jeune. J’ouvre les yeux de stupéfaction. Un autre Cetra, je crois. Mais c’est si diffus que je n’en jurerais pas.
Mince. Cette autre odeur m’est…étrangement familière pour une raison que je n’explique pas. Je suis à peu près sûr de ne jamais avoir rencontré cette combinaison exacte, pourtant l’odeur me dit quelque chose. Aurais-je croisé cette personne à un moment que je ne me rappelle, sans qu’il m’ait interpellé ?
Tout cela n’a aucun sens.
…Au moins je pense désormais parvenir à les détecter à l’odeur si je croise d’autres Cetras. Cela pourra forcément nous servir à un moment ou un autre.
Je range prestement les cheveux dans ma poche avant que Cloud ne se pose des questions, à l’abri de son regard. J’ai de la chance qu’il soit en train de scruter les environs pour le voir apparaître plutôt que concentré à ma tâche. Je lui tends le vêtement, non sans inquiétude.
-Bien, je retourne aux remparts, annonce-t-il. Je le donnerai pour analyse.
Mais le Cetra est rompu à l’exercice, vif à l’action. Son odeur devient trop diffuse après un passage dans une boutique de vêtements.

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Je décroise mes bras et soulève les deux cheveux maintenant secs à la lumière du soleil. Le blond est sensiblement plus solaire que le polaire d’Angelina…mais si je ne savais pas d’où ils venaient, je n’aurais même pas noté la différence. Même après avoir été mouillés, leur texture n’a que peu changé. Ils ressemblent en tout point aux siens.
…Je me remémore et compare leurs odeurs. Mais je suis le premier à savoir qu’il y a des similitudes entre les membres d’une famille au niveau de leur peau. Les peaux similaires réagissent de la même façon soumis aux mêmes éléments. Veld et Felicia en sont un exemple récurrent à mon nez. Et présentement, soumis à l’iode de la mer, au stress et à l’effort…
Je pourrais les envoyer pour analyse, mais si les scientifiques contactés depuis la convalescence d’Angelina laissent échapper l’information qu’un autre Cetra court les rues, sans attache ni protection, cela reviendrait à faire de lui une cible prioritaire. Plus recherchée encore que notre menace, que personne n’oserait affronter. Mais un Cetra bienveillant… ?
Je manque d’informations pour prendre une décision. Cependant, le plus crucial n’a pas changé : protéger les Cetras. Et pour l’instant, je suis le seul à savoir qu’un éventuel troisième Cetra sur Gaïa pourrait exister. Qu’ils ne soient pas éteints était déjà inespéré. Qu’il y en ait plusieurs qui œuvrent à notre bien est bien plus que nous ne pourrons jamais leur rendre. Ils vivent dans la crainte, se cachent comme des criminels – …c’est inconcevable.
Ils ont besoin de cette marge de manœuvre où ils agissent dans l’ombre. Tant qu’ils ne font rien de mal, d’autant plus s’ils pensent à bien. Je prends donc un petit cylindre en plastique normalement réservé aux prélèvements et le scelle, avant de le ranger dans ma sacoche personnelle.
Je me fige lorsque mes yeux tombent sur le ruban rose tombé de ses cheveux à Fort Condor. Je ferme les yeux, une douleur lancinante reprenant de plus belle dans le creux de ma poitrine. J’ai toujours voulu le lui rendre…mais les occasions ont manqué, puis un bon moment étant passé, le simple fait de le rendre aurait rendu la situation embarrassante.
J’ose toujours espérer les approcher. Sauver Angelina est plus qu’assez. Elle est déjà de notre côté, a déjà envie de nous aider. C’est plus que suffisant. S’ils la sauvent, je suis prêt à effacer toutes leurs traces le temps qu’il faut.
Leur proposer un marché.

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Une partie de mon cerveau reste toujours en alerte pour Angelina. Même lorsque je dors, il y a comme un bruit de fond seulement fait d’elle. Cette part de moi concentrée sur elle. Plus elle est proche, plus cela devient vrai. C’est pourquoi je me lève comme un soldat, hâtif et au garde-à-vous lorsque j’entends sa voix s’élever, et ses mots s’enregistrer lorsque la partie plus rationnelle de mon cerveau est en marche :
-Bon sang mais qu’est-ce que tu t’imagines ! Que ça me fait plaisir ! Je ne veux pas abandonner ! Je vais essayer jusqu’au bout, mais Vincent est en train de mourir Elfé ! Vous avez trouvé quelqu’un d’autre alors s’il te plaît ne me force pas à regarder ça plus longtemps !
Sa voix effleure les aigus, communiquant sa détresse.
-Que se passe-t-il ?
Je ne fais pas en sorte d’être particulièrement silencieux, et son volume n’était pas du tout maîtrisé, mais elle a l’air particulièrement surprise de me voir. Elle ferme prestement le tiroir de sa table de chevet. Elle ne s’explique pas, m’indiquant son besoin de me cacher quoi que ce puisse être. …La connaissant, cela ne m’indique rien de bon.

Mon regard se pose sur Felicia, sentant une colère froide s’emparer de moi, difficile à contenir. Toute personne s’interposant avec sa tranquillité et sa convalescence aura affaire à moi. Et ce qu’elle me considère ou pas.

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C’est rassurant…de la contempler dormir sans faire de cauchemars. Quand elle est éveillée et qu’elle vous affronte du regard, vous avez affaire à un blizzard, une force de la nature. Un caractère intransigeant et difficile parce qu’entière et sans aucun regard pour la négociation. Un brin de prestance, et beaucoup d’exigence. Un masque de désinvolture pour cacher sa fragilité. Mais quand elle dort profondément comme ceci…ses traits fondent en sa vraie nature. Elle est aussi vulnérable et généreuse qu’elle n’en a l’air. Moi quand je l’observe…
Je dégage ses cheveux de ses yeux avec précaution. Puis m’autorise un moment d’égarement en posant doucement mes lèvres sur le coin de son front. Mes lèvres s’attardant, je caresse ses cheveux pour dégager son visage. Contre cet or terni par la difficulté, j’énonce intérieurement une prière qu’elle se déjoue encore de la mort avec moi. Qu’elle n’en a pas encore eu assez, de sa vie. De moi.
Je mémorise encore son odeur, vérifie l’évolution de son état par réflexe, conscient que chaque moment avec elle pourrait être le dernier. Elle ne sera jamais aussi belle et précieuse qu’offerte par le présent.
Son odeur rappelle une forêt enchantée, épaisse, étendue et luxuriante soufflée par un vent épris de liberté. Remplie de vie mystique et de Lifestream, douce et apaisante, arrondies de notes florales et de flocons de neige. Lorsqu’elle est contrariée, c’est une froide nuit d’hiver sous la neige, aux abords d’un lac gelé aux eaux bleu clair glaciaires. De bonne humeur…c’est une aube resplendissante sur un champ naissant et des pétales d’amaryllis, parsemés de rosée de cette même eau glaciaire, baignés de minces rayons matinaux.
Me disant que j’ai assez outrepassé mes droits, je l’embrasse une dernière fois plus sobrement sur la tempe, respirant sa chevelure avant de me redresser. Un mince sourire étire tout juste ses lèvres, emprunte de sommeil.
Je revois son sourire. Je ne me souviens que des premiers effluves de son parfum, loin d’avoir les sens d’aujourd’hui. Ses longs cheveux glissant sur son épaule alors qu’elle se penchait sur sa table de travail. Son léger sourire quand elle faisait un progrès.
Le souvenir de Lucrécia me fait un électrochoc me traversant de la tête aux pieds. De l’aversion, de la culpabilité, mêlés de peine intense. Je m’éloigne et serre les poings, mon corps subjugué me fustigeant pour mes égarements…juste avant que mes yeux ne tombent sur la table de chevet.

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Je regarde la porte fermée de la chambre, mon esprit tout à Angelina seule dans la pièce. Tous mes sens sont tournés vers elle. Mon ouïe m’assure qu’elle ne fait que rester allongée, que rien ne bouge dans la pièce. Mais mon corps tout entier brûle de s’en assurer en restant dans la même pièce qu’elle dans un état si vulnérable et susceptible après notre dispute.
-…Felicia. Si tu n’as rien à faire à part développer des inepties, je te demande de partir, je lui lance, passablement excédé.
-Ce ne sont pas des inepties.
-…Elle ne sait pas ce qu’elle veut. Elle a seize ans, je glisse, souhaitant mettre fin à la conversation le plus vite possible. …J’ai l’âge de ton père.
Je tique et soupire, sentant la gêne m’envahir juste d’y penser. Sans oublier que dans mon cœur une autre femme y brûle encore, et que peu importe ce que tout le monde pense, je ne suis pas prêt de l’effacer de sitôt. Je la regarde durement, espérant qu’elle comprenne que je ne souhaite plus en entendre parler. …Tifa s’enquiert déjà bien assez sur le sujet.
Est-ce que la jeune fille sait, ne sait pas ? Angie est à un âge où elle découvre ses possibilités et ses armes. Pas un futur figé dans le marbre. Sans même compter son impulsivité…j’ai bien appris à mes dépens qu’une autre de ses spécialités est de systématiquement tester ses limites. Elle est plus synonyme d’inquiétude que d’ambition à mes yeux.

-Vous avez cessé de vieillir. Et qu’elle ait seize ans ne change visiblement rien à vos sentiments à tous les deux. Elle souffre.
Je fais bien attention à ne rien montrer. J’ai envie de lui sommer que je n’ai pas besoin de ce rappel. Puis je me souviens que je suis le premier victime de ce piège. Bien que ce soit malgré moi, j’en souffre les conséquences chaque fois que mes pensées s’égarent trop et que mes yeux l’adorent pour ses accomplissements. Les femmes brillantes ont une attractivité dont personne ne peut détourner les yeux, empressé d’admirer leurs prouesses hypnotisé dans leur sillage.
-L’heure n’est pas à la romance Felicia. Nous en savons peu, mais nous savons qu’elle a seize ans. Ne présume de rien.
Angelina l’oublie peut-être, mais moi ça ne m’est pas permis. Pas après toutes les fautes que j’ai déjà commises.
-Vous vous aimez ! Sincèrement et entièrement. Vous êtes prêts à tout l’un pour l’autre. Est-ce que vous savez combien c’est rare aujourd’hui ? Est-ce que c’est vraiment étonnant que vous vous soyez trouvés ? À mes yeux ça paraissait inéluctable.
Je soupire. La Angelina que je connais évolue à une vitesse effroyable. Ce qu’elle veut aujourd’hui ne sera jamais valable demain, surtout à son âge. …Je ne suis qu’une expérience.
Non – même sans cela, elle est trop jeune. Elle est juste beaucoup trop jeune. Et ce peu importe ce que tout le monde pense. C’est tout ce que je dois garder en tête. Si même ma moralité n’est rien face à elle alors…
Lucrécia. L’image de Lucrécia m’assaille, comme souvent. La peine profonde que je ressens me rappelle que je donnerai mon âme pour la revoir, ne serait-ce une dernière fois. Son odeur, sa voix, son rire…son sourire.
Je secoue légèrement la tête pour reprendre mes esprits. Angelina a raison…je me laisse trop facilement entraîner. Jusque-là, sa présence impossible à ignorer me rattachait à l’avenir. Si ce lien s’effondre, si tous nos espoirs s’effondrent, que reste-t-il ? Je soupire, fermant les yeux, excédé au point où je me sens prêt à tout balayer dans la villa. Je ferme mon poing, me sentant à la fois affaibli et galvanisé par Chaos. Ma patience épuisée par l’entêtement de tous.

Je sens sa présence grossir de jour en jour, vibrant comme un son trop fort sur le point de briser une vitre, trop à l’étroit dans ma peau. Si mon esprit se distrait, je sens les barrières s’affiner, pas plus épaisses et infranchissables que la surface de l’eau. Ses pensées s’expriment en idées claires, concises, brutales et envahissantes plus que des mots, mais je les comprends sans mal.
Bien que le désir de la sauver nous rejoigne, je sens avec une appréhension et un dégoût certain que ce n’est pas tout ce qui pousse le monstre à la coopération. Lequel de nous deux influence le plus l’autre…en ce moment, très précisément, cette donnée manquante m’épouvante.
D’ordinaire, nos pensées se croisent et s’entrechoquent, et ne prennent la même direction que durant un combat parce que nos vies sont en jeu. Je ne connais pas ses intentions profondes, ni ses intérêts. Je sais seulement que la retenue n’est pas dans sa nature.
Avec la fatigue, l’enfermer n’a jamais été aussi difficile. L’idée précise que je me fais de mon contrôle est devenue incertaine, la présence des monstres contenus en moi battant comme des diables contre la porte effritée de mes résistances.
-Quitte cette maison.
En espérant que mes pensées soient exprimées de façon on ne peut plus claire. En espérant qu’elle cesse de me faire croire une seconde que tolérer cette situation perturbante a tout ce qu’il y a de parfaitement acceptable.
Son rythme cardiaque s’accélère à peine. Elle prend une inspiration, carre les épaules et ne flanche pas à mon regard. J’oublie parfois que Felicia n’est pas seulement la fille de Veld, elle a aussi été à la tête d’Avalanche un jour, et contre Séphiroth au meilleur de sa force humaine. Elle a sa bonté, son sens des responsabilités et sa force de caractère.
Je me sens distrait en la toisant sans la voir, l’esprit devenant presque trop nébuleux par moment, seulement envahi de rouge.
-Je suis désolée, mais pour sauver Angie – vous deux, à vrai dire, je ne reculerai devant rien. Mon père tient à vous. Je tiens à vous.
Entendre le contraire m’aurait étonné, pour tout dire… Je regarde sur le côté, sentant mes mâchoires se serrer. Mon irritation monte encore d’un cran, atteignant un niveau dangereux. Ma vision rougit. Je ne suis rassuré que par l’assentiment du monstre ailé. Que croit-elle faire ?
-Si vous êtes sûr de votre Énergie, de…ce Chaos et qu’ils ne vous failliront pas, faites-moi confiance, dit-elle en désignant sa poitrine. Il faut qu’elle sache qu’elle ne va pas vous nuire à long terme. Insistez pour lui parler. Elle est au bord du gouffre, elle ne pourra pas tenir encore très longtemps. Mais lorsqu’elle va craquer, il faudra se tenir prêts et l’aider de toutes les façons possibles pour la ramener vers nous.
Quand bien même elle… Je pince les lèvres. Non. Je me souviens parfaitement des deux situations trop glissantes que nous avions eues : mon anniversaire, son sauvetage. Aucune des deux expériences ne lui avait paru réitérable.

Je nage dans une incertitude qui m’abîme depuis une éternité semble-t-il. Son abandon m’a replongé dans les ténèbres. Excepté cette fois…que c’est elle, de tous, qui fait disparaître la lumière.
-Vous l’aimez, je le sais, vous le savez, tout le monde le sait. Je vous promets de n’en parler à personne, mais Angie est en train de perdre toute motivation. Et lorsqu’on est malade et fatigué, je vous assure que toutes ces choses, tout ce désespoir s’en retrouvent amplifiés.
Elle soupire, cherchant avidement ses mots.
-…Felicia.
-Vous arrivez à croire que c’est la même personne qui a voulu rentrer dans l’eau le lendemain de ce qu’il s’est passé alors qu’elle a une phobie ? Angie a plus de courage que tout le monde ne peut l’imaginer en la voyant. Mais parfois on oublie l’ampleur de ce qu’on lui demande. Elle ne peut pas être forte sur tous les fronts, et ça n’a rien à voir avec l’âge. Elle est découragée, et fatiguée, et c’est normal.
Je baisse la tête, sentant tous mes muscles se tendre de frustration. Même si tout cela est vrai, comment ma seule présence à ses côtés ne peut-elle pas être une raison suffisante ? Ne lui ai-je pas assez prouvé que je serai toujours de son côté, prêt à l’aider et la protéger ? Peut-être plus tard, bien plus tard, si son cœur en est si épris qu’il ne peut envisager rien d’autre…la chérir – Non. Non.
-Je ne la connais pas aussi bien que vous mais…clairement, elle est méconnaissable. La seule chose consistante est qu’elle refuse de nous importuner. Mais je suis prête à parier que c’est ce qui la travaille qui la pousse dans cette mauvaise direction… J’ai déjà été à cette place.
Ses yeux se perdent un instant, son esprit sûrement occupé à ses souvenirs. Elle se reprend bien vite, déterminée.
-Elle a besoin de se sentir aimée maintenant plus que jamais. Elle en a clairement manqué, surtout si l’on en croit ses remarques et vos dires sur son père. En ce moment elle fait involontairement du mal à la personne à qui elle tient le plus. Vous savez comment elle devient lorsqu’on est concernés.
Que trop bien, malheureusement. D’où notre situation.
-Elle se blâme pour ses erreurs – montrez-lui qu’il y a plus important. Nous sommes tous passés par là, vous le premier de ce j’ai entendu. Donnez-lui ce que vous auriez aimé recevoir à ce moment-là.

« Donnez-lui ce que vous auriez aimé recevoir à ce moment-là. » Comme si c’était si simple. Je pose les yeux sur la porte de la chambre, ses mots m’atteignant plus que je ne l’admettrais. Ce que j’aurais aimé recevoir… Je ne peux m’empêcher de penser à ce qu’Angie fait pour moi quand je pense au pire. Elle ne s’éloigne pas, ne flanche pas, ne juge pas. Bien qu’elle en ait peu, elle partage sa confiance et son optimisme.
Bien que mis mal à l’aise par le manque d’intimité face à une étrangère au départ, ne pas avoir à lui raconter ni lui faire comprendre toutes les bribes de mon histoire m’a finalement soulagé. Je n’étais pas obligé de ressasser tout cela, subir des questions, entendre des remarques sur mon attitude. Je n’avais pas à me forcer à quoi que ce soit.
En un sens…elle me connaissait déjà, j’ai réalisé. Je n’avais rien à justifier. D’ailleurs…elle ne me l’a jamais demandé. Mes comportements soulevaient des protestations, pas des interrogations. Son acceptation a toujours été immédiate.
C’est vrai. Je comprends ce moment de faiblesse. Et à la fois, je ne la reconnais pas. Cette propension à sombrer nous pendait-elle au nez depuis un moment ? Aurais-je à ce point manqué les signes ? Je réalise que je n’en sais pas assez. La voir revenir attachée de force à un lit, semble-t-il arrachée aux griffes de son père ne la dérangeait absolument pas. J’étais alarmé.
Je reste aux aguets pour le moindre indice, cependant au fur et à mesure, je crois découvrir un passé bien plus sombre que je ne l’imaginais. Aurais-je sous-estimé son impact ? Elle qui est toujours consciente de mes blessures ? Aurais-je été trop bien convaincu par ses airs effrontés, comme intouchable ?
Bien sûr qu’elle n’est pas infaillible. Mais elle est forte. Quand le besoin pour elle d’agir se fait sentir, elle n’hésite pas. Là où elle chancelle, elle s’empresse de le corriger. Elle ne cherche qu’à pousser vers le haut. À la voir, les limites semblent n’exister que pour être franchies. Mais cette confiance qu’elle semblait avoir en arrivant, cette envie d’aller au-devant…c’est comme si elle n’avait jamais existée. Est-ce ma faute ?

-Vincent…
Ses yeux humides me rappellent Ă  notre conversation.
-J’ai tout essayé. Je vous en prie. Elle n’écoute que vous, plaide-t-elle.

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(Music : The Nightmare Begins de Final Fantays VII cover par Enrico Deiana)

Une partie de moi est comme toujours connectée à elle. Une partie que je ne récupèrerai jamais. Serait-ce une partie de notre âme ? Cela expliquerait-il l’intérêt inquiétant de Chaos à son égard ?
Ses pleurs me réveillent en sursaut, m’auraient alerté que j’eusse été mort ou simplement inconscient, j’en suis certain. Rendu vif et alerte, je me rends à la chambre aussi silencieusement que possible. Jamais je ne l’ai entendue gémir ainsi.
En entrouvrant la porte, Felicia m’a intimé au silence et mimé de sortir prestement. …Angelina cède enfin, comme elle l’espérait. Mais chacun de ses sanglots, de ses prises de respirations, me lacère comme des coups de fouet. Ma culpabilité est un jet de sel sur les blessures béantes.
Je sais ce que Felicia attend de moi… Que je donne le dernier coup de marteau aux résistances de la jeune fille. Je ne suis plus le dernier rempart, mais la dernière offensive. …Cependant, la simple idée de jouer sur ses sentiments comme j’ai souvent l’impression qu’elle fait avec les miens, suspendu à ses humeurs, me remplit d’aversion.
Je ferme la porte sans un bruit. Mon cœur tambourine. Ma vision rougit et se réduit à nouveau, grignotée par les ténèbres de cette présence que rien ne satisfait jamais. Ma main fait subir une pression incontrôlée à la poignée, faisant pleurer le métal.

Elle a besoin de moi.
Je sais. Je sais. Je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour rendre mon Énergie accessible. Pour la voir être refusée. Jour après jour. Chaos. La nourriture. La vie. Moi. Je me souviens des évènements lors du dernier assaut contre Costa del Sol. De chaque attention qu’elle rejette avec violence. Bon sang…j’ignorais qu’elle me craignait. J’ignorais que ce soit autant.
Les heures s’étirent pendant qu’elle se repose.
Entre… Entre. Entre !
J’entre dans la pièce et m’assoit à son chevet avec l’énergie du condamné. Je ne la dérange que parce que je ne supporte plus de la voir s’agiter sans repos dans son sommeil, assaillie par ses mauvais rêves. Et je commence par le plus facile :
-…Je suis désolé.
J’ai failli à le retrouver. Rien de ce que je fais ne suffit à te sauver, te tirer bien longtemps des griffes de la mort. Et je l’admets…cela commence à m’atteindre. Parce que plus je m’accroche pour t’arracher à elle, plus tu la retiens. Et ce n’est plus aussi clair que toi et moi contre nos ennemis. Suis-je contre le destin ?
Sa voix s’élève et s’élève. Son désarroi crève un nouveau plafond chaque jour. Mes tympans tout juste réparés sont mis à rude épreuve. Comment pourrais-je la blâmer… ? Tout ce qu’Angie a connu de bien, elle l’a vécu dans le virtuel, à travers l’aventure d’autres. Comment peut-elle me faire croire que c’est avec moi qu’elle veut vivre la sienne ? Elle n’a pas encore poussé son premier souffle de vie. Juste de survie.

-Ne me touche pas ! Je suis un monstre, tu entends ? J’ai tué Tseng. J’ai failli tuer Elfé. Et maintenant c’est toi que je tue et je n’en peux plus ! Je veux juste te sauver ! Pour une fois je t’en prie comprends-moi ! Je veux juste disparaître !
Me sauver ? Me sauver ? Elle n’a que ça à la bouche mais que pense-t-elle faire maintenant dans ce cas ? J’en tremble. De rage. Est-ce ma patience qui a été réduite à néant ou Chaos qui me pousse à réagir ainsi ? Je l’ignore, mais le coup de l’émotion passé, je sombre. Elle refuse de me regarder, de m’approcher, de me toucher, et c’est elle le monstre ?
Toutes ces pensées, ces questions sans réponses que je laissais de côté ressurgissent affublées des fantômes de mon passé. Et oser arpenter ce chemin, cette éventualité, lui causer ce tort, c’est accepter de marcher sur du verre brisé le restant de mes jours.
-Est-ce à dire que nous ne méritons pas la vie ?!
Je n’avais jamais eu l’intention de révéler quoi que ce soit. Angie est jeune. Mais elle a surtout besoin de soutien. Rien de mes propres faiblesses ne peuvent l’aider…seulement, trop souvent, elle ne me rappelle que trop bien mes propres tares. Tel un miroir, mes incertitudes me sont sans cesse renvoyées en plein visage avec le mal qu’elles produisent.
-J’ai peur de changer. De devenir celle que j’ai vue dans mes songes.
Qui ? Vas-tu enfin parler ? Je ne vois rien d’autre que quelqu’un qui est son premier ennemi. Ton mystère s’épaissit pendant que je m’effrite. Mets fin à cette folie. Abrège nos souffrances. Plus. La seule chose dont j’ai besoin d’être sauvé maintenant Angelina, c’est de ton désespoir.

-Je ne me sens pas à la hauteur. Je sais juste que tout va mal, et te sauver est la seule chose qui fait sens…
Ne dis pas cela. Pas Ă  moi.
Je me dois d’être fort pour elle, il le faut. Elle pense à bien. Elle pense encore à moi.
Mes yeux tombent sur ses épaules frêles et ses clavicules dénudées. J’essaie de me concentrer sur l’état alarmant de sa minceur… Mais c’est à peine si je me rappelle où je me trouve. Felicia.
…Mes yeux s’égarent d’eux-mêmes, attirés par les rayons lunaires qui enchantent le satin fin d’un blanc perle, acheté par Felicia, couvrant d’un voile de douceur et d’élégance toutes ses courbes. Ses cheveux blonds qui encadrent ces yeux turquoises comme l’océan, comme la vie elle-même. Sa peau est si pâle…comme regarder les noces affronter la mort.
Plus que jamais j’ai l’impétueuse envie de la protéger de tous les dangers du monde. Mon monde. De toutes ces responsabilités trop lourdes que nous avions jeté sur des épaules trop fragiles si tôt, si jeune. Cette peine que nous lui avions infligée parce que trop blessée par l’échec et ses conséquences. Mes fautes.
J’ai envie d’enfouir sa tête contre mon torse et lui offrir un instant de répit pour qu’elle reprenne son souffle. Comme la dernière fois sur le pont, sachant qu’elle ne s’autorise jamais la moindre faiblesse. Sachant qu’elle n’ose jamais rien demander. Sauf une fois, quand nous l’avions enfermée après son altercation avec Yuffie : « Restez s’il vous plaît ! », les lèvres tremblotantes.
-…parvenue à se faire haïr de la seule personne qui ne déteste personne.
Existe-t-il réellement une telle personne ? Qui ? Je sais que je me déteste plus que tout, maintenant plus que jamais en sentant mes yeux s’égarer plus que de raison et imaginer un futur irréel. Elle me fixe.
Tous ses mots, ses regards, ses gestes sont comme des coups de canif au contrat nécessaire qui me lie à ma morale. Les bribes de ma raison et de ma volonté se fêlent et se brisent à sa vue, lorsqu’elle pleure ouvertement devant moi, comme elle ne l’avait encore jamais fait. Et je ferais n’importe quoi pour arrêter cela.
Qu’on me condamne, qu’on me mette aux fers, qu’on me traite de tortionnaire… Je me dois de faire tout ce qui est nécessaire pour la retenir. Surtout quand je suis pointé du doigt comme étant la solution, pour une fois dans ma vie.

Seule ma propre spontanéité me perturbe. La facilité avec laquelle j’avais agi et acté une solution qui n’en était pas une. Avant que je ne le réalise, je l’avais embrassée éperdument. Mon corps reflète mes pensées et sentiments les plus profonds sans que je ne puisse l’arrêter. Une tentative désespérée.
J’ai promis de ne pas commettre les mêmes erreurs passées. Une promesse nécessaire pour excuser ma présence encore ici sur Gaïa. Je suis là. Et maintenant toi aussi. Je resterai le temps qu’il faudra. Pourquoi ne le vois-tu pas. Pourquoi ne le veux-tu pas ?
Mon esprit se vide un instant, seulement empli de sensations et d’émotions qui échappent à mon contrôle. Sentir ses lèvres contre les miennes en entendant son cœur battre est un soulagement indicible. Quelque chose éclate à l’intérieur de moi. Mon cœur court après le sien, comme désireux de refléter son rythme après avoir déjà mémorisé sa musique. La neige fond.
Je m’éloigne, fébrile. Interdit. Elle sent si bon. Je ressens une telle justesse à la tenir entre mes mains. Une part de moi me maudit, l’autre attend le moment de vérité. Le tout s’étonne, traversé de soulagement que cela ait cessé ses pleurs. Que suis-je en train de faire… ? …Je devrais partir. Ce que je fais n’envisage rien de bon. À mes lèvres, cet acte avait été trop voluptueux pour être amoral et ce n’est pas – elle me retient.
J’attends. Je l’implore presque, intérieurement, de me prouver que nous avons tort et qu’elle n’est pas si jeune et si facilement corruptible qu’il n’y paraît. Qu’elle ne ressent pas ce qu’elle croit ressentir, et qu’elle n’en est qu’à ses débuts. De mettre un terme à ce moment de flottement vertigineux avec une pincée d’émoi que ma morale condamne.
-Tu n’es pas un monstre. Tu ne l’as jamais été. Tu – …Tu es ce qui compte le plus pour moi.
Je me sens envahi d’un sentiment de – Il ne faut pas. Je ne dois absolument pas commettre cette erreur. Je n’en ai pas le droit. Je suis conscient de ce qu’il se passe. Tout ceci n’est qu’un terrible accident parce que personne ne lui a donné l’attention qu’elle méritait auparavant. Cette infatuation lui passera… Tout cela n’ira nulle part. Elle ne veut pas mener son futur à moi. Je suis déjà passé par là. Revivre cette déception n’est pas dans mes plans ou mes priorités.

Connaître la sensation de son cœur brisé et recommencer revient à s’exposer sciemment à ses morceaux coupants, éclatés sur la route. Se cassant chaque fois plus, à chaque échec toujours plus retentissant. À accepter de l’arpenter, pavé de ces morceaux toujours plus nombreux, plus profondément ancrés dans la chair. À les laisser s’amonceler sans parvenir à les retirer… À être forcé de regarder devant, espérer de meilleurs lendemains, mais savoir ce que le reste du chemin laisse à envisager dans une nuit sans lune : des horreurs, du chagrin et toujours plus d’espoir détruit.
Angelina ne connaît pas l’amour. Elle n’en parle même pas.
L’amour adulte, l’amour sincère, c’est accepter de marcher sur ces morceaux brisés en attendant un salut en vain. …Mon cœur a totale emprise sur mes décisions, sur moi – il bat pour me faire vivre et s’il appartient à quelqu’un alors… Mes sentiments sont un pouvoir dangereux à laisser entre des mains non avisées et inexpérimentées.
Je l’ai bien appris à mes dépends. Plus encore avec Angie.
…Que je sois maudit, car même cette motivation s’effrite. Elle croit si facilement à l’adversité et aux masques de froideur. Qu’a-t-elle bien pu vivre avec son père, sa famille, ses amis ? Ma curiosité sur son passé me ronge. Je remarque combien il est difficile pour elle de s’imaginer aimée et chérie. Bon sang… Elle me pousse même involontairement à lui prouver combien elle a tort.
Elle me voit, me regarde droit dans les yeux, et ne tire aucune conclusion. Elle n’a vraiment pas la moindre idée. Et je me demande si moi non plus. S’il est si facile pour moi aussi d’accepter la haine et la culpabilité plutôt qu’une réponse plus difficile mais évidente. Lucrécia et son père auront-ils toujours cette emprise sur nos vies ?
L’humain n’est-il pas foncièrement aimant et empathique jusqu’à apprendre l’inverse ?
Et je me sens soudain rempli par l’envie impétueuse et irrépressible d’avoir mes réponses. Est-ce simplement être aimée qui la fait céder ? Ou réaliser ce qu’elle laisse ? Vivre en adulte comme dans un parc à thème ? Prendre tout ce qu’il y a à prendre sans penser aux conséquences. Dévorer les plaisirs.
Pourquoi se sacrifierait-elle ? Parce qu’avec sa désinvolture bourgeoise, sa dignité par-dessus tout et sa volonté de fer, j’ai du mal à le concevoir. Elle a tout d’une personne qui connaît son importance. Elle comprend ses responsabilités. Tient ses promesses. J’y ai cru fermement. Là…elle me jette dans les ténèbres et le désespoir. Pourquoi meurs-tu pour une infatuation, un jeu, une expérience ? Ne pousses-tu pas le jeu trop loin ?

-Tu es ce qui compte le plus pour moi.
…Mais comment ai-je pu laisser faire cela ?
Cependant…si vraiment…le pire est arrivé, et qu’elle pense avoir des sentiments pour moi, ceci est la brèche dont parlait Felicia. Elle veut devenir une héroïne. Faire ses preuves devant tout le monde, et surtout à elle-même. Je le comprends. Mais moi j’ai seulement besoin qu’elle soit elle. Vivante. Elle m’écoutera, n’est-ce pas ? Il le faut.
-…Si tu le penses, je glisse. Prends mon Énergie.
Je me hais et me condamne à la seconde où je prononce ces mots car je sais ce qu’ils sous-entendent en ne niant rien. Parce que même encore à l’article de la mort, elle pense à moi. Elle l’a toujours fait. Si personne ne lui a témoigné la moindre affection avant, je réalise que l’inverse n’est pas systématique.
Personne n’achète ni n’entaille la volonté d’Angelina Anderson, encore moins lorsque des vies sont en jeu. Elle a appris à nager à contre-courant et à faire le premier pas pour obtenir ce qu’elle veut. Elle a une détermination que j’admire plus que tout malgré mon expérience sur ses jeunes années.
Plus encore…personne ne m’a témoigné une telle loyauté. Elle refuse de me négocier. Jamais, même pour une minute, faisant fi de sa propre personne. Cela signifie que de sa solitude…n’est pas née la haine. Si on fait fi de ses défauts, on ne peut voir que son courage sans faille.
Elle a faim de meilleur. Soif de passion. Languit l’amour qu’elle n’a pas eu, qu’elle voudrait avoir jusqu’à l’ivresse. Comment peut-elle m’en croire encore capable ? Ma chair et mon âme n’ont été que trop étirés avant de se déchirer de part en part par la réalité.

Sa bonté malgré son passé me fait faillir, même à un moment si grave alors qu’elle mérite le meilleur. Je dois me préparer à braver son caractère indéfectible, et briser cette volonté qui la caractérise pour qu’elle se reforge mieux. Elle doit vivre. C’est tout ce qui compte. Alors je négocie. Ce n’est pas qu’un moyen pour moi, chaque moment passé ensemble devenant beaucoup trop sincère, mais la fin justifie les moyens, c’est cela ?
-Je tiendrai ma promesse. Tu m’as clairement dit, que tu avais besoin de moi vivant, et si c’est ta condition non-négociable, tu l’as. Mais je ne vais pas t’abandonner. Ni maintenant, ni jamais. Où que tu sois, je viendrai te chercher. Et je te sauverai.
Car c’est ce que nous sommes. Me promettre que je ferai face aux conséquences plus tard est la seule chose qui m’aide à maintenir l’esprit rivé sur ce qui était en jeu. Mon cœur veut rester. Ma raison veut s’en aller. Mon corps se fige pris entre les deux. Chaos qu’elle fascine l’influence à céder. Une seule chose est certaine : je dois la sauver.
-Fais-moi confiance.
Chaos. Je laisse volontairement la barrière entre nos Énergies s’affiner. Nos existences s’assimiler. Comme en combat, je sens nos objectifs s’aligner. Je prends ce risque, pendu à un fil… Et je vois son expression changer, son corps réagir. Des notes envoûtantes de jasmin et de rose blanche percent le lac de sel gelé. Je me doutais de combien je lui avais manqué – non, mon Énergie. Je vois combien elle est misérable et nécessiteuse. Avide et…inassouvie. Elle est affamée.

Elle a besoin de moi. Non.
Mais…et si ce n’était jamais de moi réellement dont elle a besoin ? Ni qu’elle pense aimer ? Quand bien même, je l’embrasse avec tout ce que je me refuse à ressentir, un seul instant, le cœur lourd mais battant. Je pense à ce que je dois faire. Je la pousse dans ses retranchements, l’assaille d’idées qui j’espère rendent l’avenir impossible à refuser. Je la somme de prendre la bonne décision avec tout mon être. Pour ne pas céder à ses demandes enfiévrées.
Mais est-ce que je pense encore vraiment ? Est-ce que toute raison n’a pas quitté mon esprit depuis un moment ? Ne nous sommes-nous pas complètement dévoyés désormais ? J’entends le rire de Chaos. Je me croyais incapable de tout cela. Plus jamais. Pas quelqu’un d’autre que Lucrécia. Pourtant, entre mes mains, elle frémit.
À chaque tournant, j’attends qu’elle change d’avis. Soit touchée de réalisation, me repousse…définisse clairement les frontières. Désir ou nécessité. Les deux. Faire ou semblant ou tout avouer ? Mensonge ou vérité ? Rien. Jusqu’au dernier moment elle me surprend. Son odeur florale et fraîche devient suave et épicée, difficile à ignorer. Elle est pressante et lascive. Vorace.
Je suis énamouré lorsqu’elle caresse mon visage. Enivré lorsque ses mains s’aventurent sans frilosité sur ma poitrine. Je retiens un sursaut quand elle s’empare de mon haut, transformant mon songe en rêve fiévreux, maintenant mes pieds sur terre. Je suis en train de perdre, je crois. À une vitesse vertigineuse. Quels étaient encore les objectifs de cette négociation ?
-Mon Énergie, Angie.
Je dois m’éloigner et prendre une pause pour reprendre mon souffle et me rappeler les vrais enjeux. Soupir. La repousser ? Qui est-ce que j’essaie berner exactement ? La voir perdue comme si je l’avais interrompue au milieu d’un repas me rend fiévreux.
-Es-tu devenue la personne que tu souhaites ĂŞtre ?
Elle parle et répond enfin, et c’est un soulagement sans nom. J’efface rapidement l’idée que mes lèvres aient pu déverrouiller quoi que ce soit, parce que cette accalmie est plus que bienvenue. Je la préfère de loin à ses féroces avances. D’ailleurs je dois effacer le souvenir de leur sensation tout court. Parler m’aide à me refroidir. Lui faire promettre nul moins que ce qu’elle a déjà fait jurer me remet la tête sur les épaules.
-Tu es tout ce que je désire, elle murmure doucement. Et parce que je veux être différente…je vais vous faire confiance, et essayer de faire de mon mieux. C’est promis.
Tout ce que… Arrête. Arrête.

Angie ne perd pas de vue ses objectifs, contrairement à moi. Puisque c’est moi qui lui ai offert et ouvert le buffet, je ne peux plus reculer, pas avant que l’affaire ne soit conclue. J’en perds mon souffle, comme lorsque nous dansions, sa tête sur mon épaule, un sourire rêveur étirant ses lèvres, son corps rendu palpitant par sa respiration courte contre le mien.
Elle m’embrasse alors d’elle-même, comme s’il n’y avait jamais eu aucun doute. Comme si nos plans d’existence étaient lisses et semblables, égaux en tout point. Quand elle touche ma peau, cette barrière disparaît. J’ai la sensation de toucher le bonheur du doigt. Comme si elle n’avait jamais joué.
J’ai enlevé mon gant, étendu le champ de nos contacts. Je suis terrassé par sa douceur. Elle sourit. Les morceaux éclatés de mes chagrins se transforment en brume de douceur à l’aube. Sous ses rayons, les morceaux de verre redeviennent le sable d’une plage de possibilités.
Entre ses mains impérieuses, je suis en vérité peu de choses, alors Chaos possède lentement mais sûrement mon esprit. Chacune de ses réponses ostensiblement positives entaille mes résistances et noue mes entrailles. Garder en vue ce que je dois faire dans ce torrent de sensations, sa voix, sa présence, son odeur, son toucher et ses lèvres devient impossible –
Je ne devrais vraiment pas faire ça.
Elle se tend, me foudroie de ce regard familier et enfin je m’attends à la réaction adéquate. Je suis plus préparé depuis longtemps à la déception. Je sais que c’est inacceptable. Je suis prêt. Je me suis facilement trop fait avoir à l’instant, c’est vrai, j’y voulu y croire, je me suis laissé faiblir. Mon cœur se serre, se prépare au retour de flammes. Non, c’est une réaction presque bienvenue. Mon contrôle m’échappe. Je dois me réveiller.
-Embrasse-moi !
Chaos ricane. Elle ne demande pas. Elle exige. Il n’y a aucune peur, aucun regret, aucune hésitation sur son visage. Sa voix et ses yeux ne sont jamais aussi sûrs que lorsqu’elle dit ce qu’elle pense tout haut. Son cœur bat aussi vite que le mien à mes tempes. Et c’est pire que tout.
Ne la fais pas languir. Prends-la sombre idiot.
Elfé avait raison sur toute la ligne. Je refusais de voir l’évidence. Je suis épuisé, vidé de toute mon Énergie – pourtant je me sens exalté. Piégé et exaucé. Sans aucun retour en arrière. Je faillis. Je faillis pour elle. Je faillis à la protéger de ce qui compte vraiment. Je la fais vieillir avant l’heure. Je la ravis pour moi.

Peut-être bien que nous ne sommes que deux personnes qui ont envie d’être aimées plus que s’aimer. Peut-être que nous avions tous les deux besoin de se raccrocher à quelque chose, et que personne n’est plus irréprochable que l’autre. Juste deux personnes avec le poids du monde sur les épaules, et une responsabilité qu’ils n’ont pas demandée.
Quel genre de femme Angelina serait devenue dans des circonstances normales ? Aurais-je vraiment autant accroché son regard qu’elle le prétend. Aurait-elle ralenti sa marche…ses yeux turquoises baignés de soleil, s’attardant sur mon visage comme elle le fait, son cœur accélérant. Serait-elle vraiment attirée par une ombre ? Est-ce que son âge n’aurait jamais été qu’un chiffre ? Ou le signe clair d’une personne influençable quoi qu’on en dise ? Ces sentiments sont-ils à cause de moi, ou à cause d’elle ? Qui a commencé cette infamie ?
…C’est elle, je crois. Avec sa franchise à toute épreuve, ses compliments jetés à la volée comme monnaie courante comme si les mots n’avaient aucun poids. Angelina n’est jamais aussi sulfureuse qu’emplie d’assentiment, une main sur la hanche, et armée de certitude.
-Vous vous trompez, vous savez. Vous êtes très beau, et ce corps est magnifique. Différent, c’est sûr. Mais en tout point parfait. Vous êtes très chanceux quand on sait qu’on ne peut pas choisir. Bien qu’il n’ait pas su satisfaire une certaine femme à l’époque, aujourd’hui, il contenterait avec joie des centaines d’autres.
Des centaines ? Ce n’était pas nécessaire, ni convénient, ni souhaitable. Elle se retourna.
-Pas comme moi, rajouta-t-elle si bas que je n’étais pas sûr d’en être le destinataire.
Quelqu’un comme elle pouvait-elle vraiment penser cela ?
-Vous retrouverez quelqu’un qui vous fera changer d’avis, j’en suis sûre, lança-t-elle d’un ton désinvolte en s’éloignant, jetant une main par-dessus son épaule, d’un pas aussi décidé que son ton.
Il y avait une telle certitude dans sa voix que c’en était déconcertant. Lisait-elle l’avenir en plus de connaître le passé ? Était-ce son véritable pouvoir ? Ces yeux turquoises ne peuvent être sans signification…
Sa phrase pourrait à s’y méprendre ressembler à une proposition, sa posture élégante, épaules en arrière la ligne de sa colonne vertigineuse et ses yeux traînassant à des invitations.
J’ai encore en mémoire son regard lorsqu’elle dégagea des mèches de mon visage, comme on admirerait un tableau.
-La preuve, je vous dis sans ciller que je vous trouve très beau. J’éprouve même soudain de profonds regrets d’avoir ne serait-ce songé à frapper votre visage.
Effrontée. Provocatrice. Son doigt caressa la courbe de la table, et se détacha juste avant de m’atteindre, affublée d’un air suggestif.
-J’aurais dû frapper un endroit beaucoup plus fragile et incommode, qui, je suis sûre…a tout à envier à votre beauté.
Elle avait une étrange façon détournée de s’exprimer, mais on ne pouvait réfuter son honnêteté intrinsèque d’une brutalité impartiale, addictive et fascinante. Le temps passa et continua de me conforter dans l’idée que je saurai toujours sur quel pied danser avec elle. Si elle ne tolérait aucun mensonge ni n’en prononçait alors…
Non, tout sentiment de sécurité n’est qu’illusoire. Rien n’est immuable. Elle me le prouve bien. Sa vie entre mes mains est aussi précaire qu’un papillon sans dessein.

Est-ce moi…? Ai-je laissé passer autant de signes que le sous-entend Tifa ?
Il y a un certain souvenir que je voudrais effacer. Très tôt, à Fort Condor, allumant l’écran de mon PHS pour son confort. J’étais travaillé par les récents évènements.
J’avais parfaitement en mémoire la pression de son poids plume contre le mien alors qu’elle voulait me plaquer au sol pour me protéger de l’explosion. La beauté, la spontanéité et la rapidité avec laquelle elle avait pris cette décision en faisant fi de sa propre sécurité m’ont époustouflé.
Je me sentais déjà extrêmement responsable, abandonnée dans mes bras jusqu’à Fort Condor. Après cela, son image d’inconsciente ingrate et égoïste s’était retrouvée en lambeaux, ses mots vindicatifs apparaissant pour ce qu’ils étaient réellement : une contre-offensive à une âme fragile et esseulée plutôt qu’hautaine et solitaire.
Il y a eu toutes ces instances…réduits encore et encore à des situations délicates auxquelles seul un fabulateur dirait rester de marbre. Je me rappelle de son odeur encore imprimée sur mes vêtements après notre virée en scooter. Influencé par la surprenante et forte impression que plus nous rapprochait qu’éloignait après nos mésaventures, intrigué de gré par l’existence d’une femme qui puisse si ouvertement déclarer son attraction sans retenue, une morale intangible couvant sous sa bourgeoisie… Je me souviens avoir été piqué de curiosité.
Je l’avais trouvée admirablement à l’aise en ma présence, nullement dérangée par une aura qui repoussait d’ordinaire sans mal les gens. Était-elle inconsciente, ou juste simple d’esprit ? Aucune peur ne ternissait son odeur à mon sillage, même en sachant ce que je recelais.
Je voulais explorer pourquoi, élucider son mystère, comprendre son mécanisme. De multiples questions brûlaient les lèvres en la regardant, me ressassant son air inquiet, son insistance derrière des piques et des épines.
-…Je n’en ai pas besoin, c’est toi qui devr –
-Balivernes ! Mangez ! Encore un peu et vous auriez perdu un bras !
Pas si facilement. Était-elle sûre d’avoir la pleine mesure de qui j’étais ? Elle place le pain enroulé de papier devant mon bras sur la table.
-Mangez, ordonna-t-elle avec un geste sec de la main, des foudres dans ses yeux laissant entendre qu’il n’y avait aucune place pour la négociation.
Il y a une divergence importante entre ce qu’elle dégage et ce qu’elle fait. Quelque chose qui me renvoie à ce que j’entends de l’idée qu’on se fait de moi.

Le rire de Chaos s’accentue, comme sa présence, me rappelant que je n’avais pas le luxe de laisser mon esprit se perdre dans les songes ou les souvenirs.
-…Nous ne sommes pas obligés de procéder ainsi bien sûr, mais –
Chaos ne semble pas de cet avis, cependant –
-D’accord ! Tu as gagné ! Maintenant continue s’il te plaît !
Bon sang… Je sais qu’aucune divinité ne pourra me sauver de cette situation, encore moins avec Chaos à la lisière de ma sanité. Alors j’inspire profondément. Me prépare au pire – tout en sachant que j’étais déjà en pleine chute libre, de fait le temps des préparations est révolu. Je désigne ses lèvres, puis les miennes… J’ai dû mal à respirer confortablement. Mon propre geste rend tangible cette transgression. Son parfum serait entêtant et envoûtant si ce n’était pour Geostigma. Ses yeux avides, dénués de retenue et de tourments, me mettent à genoux et me poussent à la faute.
Il émet un rictus, grisé. Là…Viens. Avec moi, tu ne manqueras plus jamais de rien.
J’essaie de garder l’esprit rivé sur ce qui est en jeu, mais à chaque avance que je fais, Angie ne m’arrête pas. Et je me demande avec inquiétude jusqu’où elle va me laisser avancer. Où va-t-elle poser des limites, effacer les ambiguïtés, définir ses besoins : pure nécessité, ou motivée par l’envie ? Ou galvanisée par le plaisir du jeu ?
Cet ange ensorcelant ne tergiverse pas, néanmoins se pose où et quand cela lui chante. Au gré de ses envies dénuées d’inhibitions. Seulement arrêté par la peur de se transformer en démon, puisque sillonner aux abords des ténèbres ne lui fait pas froid aux yeux. Il n’aime ni les limites, ni les commandements. Ainsi, même le pire est loin de décrire ce qu’elle encense. Ah…vraiment, je la veux. Donne-la moi. Tu n’es qu’un ignorant. C’est moi dont elle a besoin. Jamais.
J’étais censé l’influencer. Mais ses assentiments affirmés me grisent plus que de raison. L’espace d’un instant, seuls le rire de Chaos et les sensations de mon corps me parviennent. J’ai cette étrange vision d’elle sur ce lac gelé sous une voûte étoilée, en position d’alerte, me fixant des yeux en pliant la nuque vers le haut. Elle a l’air confuse et démunie. L’ombre de Chaos s’étend sur elle, partageant la silhouette de ses ailes démoniaques. Bientôt, il l’enfermera dans son cocon damné.

Je ne sais ce qu’il souhaite de la jeune fille. Je sais seulement que la mesure n’est pas dans sa nature ni ses désirs primitifs. Ce qu’il veut, il l’obtient, et n’admet aucun obstacle ni défaite. Les notions de morale, de bien et de mal, de haine, de violence et de mort sont des concepts réservés aux mortels. Tout et tous sont égaux face à lui. Face à la mort selon ses termes.
Angelina, contre toute attente, ne le craint plus. Elle ne détourne le regard ni ne fuit devant sa présence imposante. Nos présences forment comme un univers rempli de nébuleuses, d’ombre et de lumière, plus vaste et merveilleux que personne ne peut l’imaginer. Chaque peine, chaque pensée, chaque sentiment et émotion fait naître une nouvelle étoile qui l’habille.
Si indigente. Comme si elle lui faisait de la peine, s’il pouvait en ressentir. Il ricane encore. Cela lui ressemble, de railler la misère. Tout est de ta faute, m’accuse-t-il en retour. Il l’étreint avec son âme elle-même, me semble-t-il.
À mon étonnement, il ne lui témoigne aucune agressivité. Il sourit, semble-t-il au comble d’une hilarité que je ne parviens toujours pas à saisir. Viens. Prends. Il lui offre généreusement ses réserves sans difficulté, d’une Énergie aussi pure que possible, rouge de plaisir. Cependant jamais l’idée qu’elle soit offerte sans attentes ne m’a habité.
Je sens pourtant Chaos soulever ma commissure pour un sourire alangui et vindicatif en la contemplant de ses propres yeux. Puis il la touche de ses propres mains, la sent de son seul gré et il s’en réjouit, tel l’être dénué de scrupules qu’il est, me glaçant d’effroi.
Je lutte pour reprendre le contrôle – cette fois c’est moi qui suis enfermé. J’ai été dûment affaibli, dupé et distrait. Elle est délicieuse. Avec un bref soulagement, je note qu’Angie ne panique pas. Ne crie pas. Ne s’effraie pas. Au contraire, elle l’accepte sans réserve et lui retourne ses attentions impérieuses sans grande résistance. Le grognement du monstre s’apparenterait presque à un ronronnement, donnant l’illusion qu’il a été apprivoisé.
Cela ne va pas durer. Sûrement sait-elle à qui elle a affaire ? Elle risque de réaliser. Il risque de ne pas apprécier sa réaction. Tout pourrait déraper en un clin d’œil. Étouffé par ses entraves mentales, renforcées suite à mon appel à la surface de nos prises de contrôle, je peine à concevoir la tournure des évènements.
Je sens du changement. Bon sang, par chance la quantité d’Énergie colossale qu’elle lui soutire goulûment me permet aussi soudainement d’avoir un répit et reprendre le dessus sans accroc. J’en suis encore tétanisé. Je n’avais encore jamais fait appel à lui en dehors d’un combat. Jamais je ne le laisserai sévir, lui faire de mal. Mais…cela n’enlève pas le fait qu’elle ait subi puis retourné ses attentions. Le mal n’est-il pas déjà accompli ? Je suis le responsable. Ne l’ai-je pas déjà trahie au moment où je suis entré dans cette pièce avec l’idée de la faire plier par tous les moyens en ma possession ?

Je ne pensais qu’à ma chute, mais il n’a jamais été question de moi… Comment ai-je osé ne pas le réaliser ? Ai-je commis l’irréparable, lancé la première pierre ? Est-ce ainsi que les anges choient ? Pourtant, une autre partie de moi – peut-être mon instinct, Chaos et l’attitude de la jeune fille m’intiment qu’elle savait ce qu’elle faisait. Elle l’a toujours su. Toujours voulu.
Peut-être… Elle a toujours su ce que j’abritais. Qui il est, ce qu’il fait. M’approcher, me fréquenter…me désirer signifie être confronté un moment ou un autre à cette part de moi. Et clairement, depuis qu’elle l’a rencontré, sa peur a complètement laissé place à l’envie.
Je ne saurais l’expliquer, ni décider ce qui devait m’inquiéter le plus : sommes-nous une seule et même personne à ses yeux ? S’est-elle toujours préparée à faire face à cette part de moi ? Me fait-elle véritablement confiance pour ne jamais lui causer le moindre tort ? Partagent-ils quelque chose que je ne serai jamais en mesure de comprendre en tant qu’humain simplement retrouvé maudit par ses fautes ?
Je ne sais pas quoi en penser. Je suis confus par la tournure de cet échange. Elle saisit doucement mes mains, l’air inquiet.
-Est-ce que ça va ? questionne-t-elle.
Bon sang, elle n’a pas l’air troublée le moins du monde…
Je regarde ma greffe. J’ai accusé son âge à maintes reprises, à tort et à travers. Mais voilà qu’elle accepte sans réclamation et une facilité déconcertante une partie de moi qui me cause encore des sueurs froides.
Elle est parfaite. Peut-ĂŞtre. Mais jamais. Oublie. Oublie.
Son rire résonne en écho dans ma tête. Il s’amuse de mon ignorance. Il sait quelque chose, quelque chose d’important qui fait tout à fait sens pour lui, mais que je ne pourrai jamais découvrir sans son aide. Il me le cache sciemment. J’en rage de frustration.

Angelina s’agite. Chacun de mes émois rend la bête plus difficile à renfermer. Je l’embrasse une autre fois, parce que son inquiétude pour moi me transporte. Parce qu’elle me manque déjà, parce que Chaos en veut plus et je ne peux pas vivre avec l’idée qu’il soit le dernier souvenir qu’elle ait de moi.
Pour voir…si l’amour et l’affection font vraiment taire ses angoisses. Mais au fond, n’est-ce pas déjà la preuve que la situation m’échappe ? Avec autant de volonté de sa part, lui résister va rapidement devenir impossible. Ses exigences incontrôlables.
Chaos grogne de frustration. Il me prend à la gorge. Je peine à garder la tête au-dessus de la surface. Tout est si sombre, si distant – l’odeur et les lèvres d’Angelina me ramènent à la raison. Les battements de son cœur accompagnent mes pas vers la réalité. Par la même occasion, sans le savoir, elle l’apaise en le satisfaisant, aussi bien qu’elle m’apaise moi.
Après un instant, son cœur décélère…et son humeur se calme. Me donnant l’illusion que j’étais réellement tout ce dont elle avait besoin. Que toutes ces confrontations avaient une explication et une autre éventualité depuis le début.
Ses yeux ne dévient pas. Ses lèvres ne protestent pas. Il n’y a toujours aucune réalisation, aucune rebuffade. Aucun regret. Elle ne reproche que ma négligence pour ma santé. Et je flanche encore. De combien puis-je encore tomber plus bas ?
Si j’étais sa solution comme elle était la mienne, cela voudrait-il dire qu’elle ne jouait pas ? Qu’elle ne sait vraiment pas ? Et que j’ai failli ? …Depuis combien de temps je tombe ? Depuis combien de temps est-ce déjà trop tard et je me refusais à le voir ? Depuis combien de temps je me ridiculise aux yeux des autres ?
-Je voulais aussi que tu reviennes. Alors bats-toi.
L’essentiel et l’évidence ne sont-ils pas réunis ? Je la regarde, éprouvé. J’ai besoin de voir qu’elle est là, qu’elle va bien. Ses yeux et son toucher posent un baume sur mon âme. Personne d’autre ne fait sens…
Il ne peut y avoir personne d’autre. Plus maintenant. Plus jamais. Après un moment de flottement et d’incertitude de ma part, il rigole encore.

Mais… Lucrécia. Je ne veux pas oublier Lucrécia. Je ne veux pas faire comme si rien n’était jamais arrivé, comme si je méritais le moindre dénouement positif. Je ne veux pas de cette mascarade. Je veux encore la retrouver. Une part folle de moi me sacrifierait pour la retrouver, ne serait-ce qu’un instant. Entendre sa voix, la voir sourire, mémoriser son parfum.
Je nage en pleine tempête. Cette maladie, cette nuit, Chaos, ce revirement, ces réalisations. Je dois me faire violence pour lui refuser un baiser – son évidente déception me noue les entrailles. L’image de Lucrécia me prend à la poitrine, m’étouffant. Mon âme est lourde de mes péchés.
Je dois absolument me calmer. J’ai besoin de réfléchir. À présent je ne sais pas ce dont elle sera capable. Ce que je peux encore contrôler. Cela fait un moment déjà que je la sens s’emparer de tout sans jamais en avoir assez. Je dois remettre de la distance. C’est la seule chose que je puisse faire. Pour elle, comme pour moi.
Lucrécia… Lucrécia…
Elle m’observe, flaire l’incohérence. Elle n’est pas dupe. J’ai commis une grave erreur, je le sens déjà aux aiguilles de la culpabilité qui percent ma chair. Je voudrais partir, disparaître. Revenir en arrière. M’allonger dans ce champ et ouvrir les yeux sur le beau visage de Lucrécia, quand le temps était encore doux, et le bonheur à portée de main.
Pourtant mon cœur bat à tout rompre dans ma cage thoracique, inlassablement, fut-il de joie ou de tourment. Je sais qu’il battra tant qu’Angelina sera là, et il ne permettra jamais de nous laisser mourir. Pas deux fois. Plus jamais. Pas elle.
Le cri de peine de Lucrécia résonne à mes oreilles, comme assassinée par mon présent. Je presse les paupières fermées. Courbe l’échine. Terrassé par un sentiment de défaite le plus total.

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(Music : The Promise de Final Fantasy XIII version piano)

Je m’arrête au pas de la porte que je viens d’entrouvrir lorsque je réalise qu’une discussion sérieuse prend place.
-Elfé…je suis encore désolée, je l’entends dire.
-Ne t’en fais pas. Tout ce qui compte pour moi est que…tout rentre dans l’ordre.
Aurait-elle révélé quoi que ce soit ? J’aperçois Felicia remettre en place une de ses mèches blondes. Angelina lui répond d’un sourire franc et émue, sa main tenant son bras autour d’elle.
Je suis parti à peine ses yeux entrouverts ce matin… Elle est encore faible mais elle peut désormais se tenir assise sans trop de peine, et elle retrouve goût à la nourriture. Ou du moins, elle essaie au moins de le prétendre.
-Je suis contente que Vincent ait réussi à te faire changer d’avis.
J’entends un silence. Trop long. Sa tête balance, hésitante. Je pince les lèvres, ma greffe tressaille, la possibilité qu’elle puisse révéler ce qu’il s’est passé une angoisse toujours plus montante. Lorsque je suis présent avec elle je suis partagé, lorsque je suis absent je suis tourmenté par cette idée. Quoi qu’il en soit je dois l’aider. …C’est ma faute. Tout est ma faute. Je suis celui qui me suis coupé la route à toute échappatoire.
-En quelque sorte… Mais…c’est en premier toi, comme je le disais.
Je m’apprête à entrer, le sundae à la chair fraîche de cactuar surmonté de chantilly dans une coupe de glace large dans ma main, lorsque des pas se rapprochant de la porte d’entrée m’atteignent.
-Felicia, j’appelle en poussant la porte. Ton père.
Elle se lève prestement pour lui ouvrir. Mes yeux tombent sur la jeune fille, le tissu de ma cape étendu sur elle également serré dans le creux de ses paumes. Elle le tient comme un voile de protection. Je décide d’ignorer férocement ce que cela suscite.

Je crains qu’elle ne révèle tout de nos égarements. Cependant, lorsque je remplace Felicia sur la chaise, son sourire d’abord incertain devient tout à fait merveilleux, ses lèvres s’étirent lentement et me distraient en un instant de mes pensées. Ses yeux doux l’accompagnent, se relevant sur moi, me prenant dans mon entièreté, m’accueillant.
Elle ne m’avait encore jamais regardé ainsi. Je relâche un souffle ténu, évitant sa vue.
…Je m’inquiète sûrement inutilement. Angelina tient ses promesses, à moins que cela n’aille à l’encontre de sa morale. Elle ne changera pas d’avis si vite après sa dernière résolution sans d’autres embûches sur son chemin. Seulement cette fois, je serai prêt, et je l’observerai de près. Je sais que nous serons tous là.
-Pour moi ? …Merci, souffle-t-elle, un regard chaleureux entre ses cils.
Mes mâchoires se serrent.
-C’est vraiment gentil de ta part.
Ses mains ne s’effarouchent pas de la mienne lorsque la coupe se transmet, comme elle prendrait un bouquet que j’aurais acheté avant de la rejoindre. Ma pression artérielle augmente lorsque son sourire devient radieux en l’observant, son expression ouverte et pleine de gratitude. Je ne devrais vraiment pas laisser ce terrain glissant exister. Je retiens mon souffle.
-Hmmm ! s’exclame-t-elle après une seule bouchée.
Elle glousse, ses pieds s’agitant d’allégresse sous la couverture. Elle qui avait boudé un plat après l’autre, c’est un plaisir plus qu’un soulagement de la voir savourer quelque chose. Dans l’entrée, j’entends distraitement Felicia et Veld mener une conversation, le ton plutôt sérieux, mais la scène se jouant devant moi accapare toute mon attention.
-C’est délicieux ! Qu’est-ce ?
-…Du cactuar, principalement. Préconisé pour l’hydratation.
-Hm, en effet, c’est très désaltérant. Cela fait du bien après tout ça. Je crois que mes papilles gustatives reviennent enfin à la vie.
…Geostigma lui a ravi chaque chose après l’autre, mais la revoilà à minimiser ses peines avec désinvolture. Je sens mon visage se froisser de contrariété, vite contrecarré par un de ses sourires taquins m’intimant à traiter les malheurs avec humour plutôt qu’inquiétude. Je suis moins doué qu’elle pour prétendre les supporter.
Son expression ravie me ramène sans mal au présent. En la regardant, je ne peux m’empêcher…de l’être moi aussi. Je ne devrais pas. Je devrais…lui parler et… Ma gorge se serre.
-…C’est donc bon signe… Je n’étais pas sûr que tu apprécies.
-Pourquoi donc ?
-Certains n’arrivent pas à passer la première vague d’amertume.
-Hm, oui, je vois tout à fait. Seulement, nous avons quelque chose de similaire sur Terre : de l’Aloe Vera. C’est très ressemblant – très bon pour le corps également. J’aime beaucoup, assure-t-elle.

-Si tu l’apprécies réellement, je peux t’en apporter quand tu le souhaites.
Pour l’encourager. Elle penche la tête, l’air conquise. Je détourne les yeux, ma respiration devenant difficile à contrôler tandis que je déglutis, les souvenirs de la veille bataillant les regrets d’aujourd’hui me revenant en tête. Elle me propose une cuillère. J’ai un léger soupir silencieux. Angelina…
-Tu en as besoin, je fais remarquer sérieusement en refusant poliment, repoussant doucement son bras vers elle.
Cette propension à penser aux autres sous couvert d’épines, comme ce cactuar, me surprendra toujours. Et sachant combien elle l’apprécie maintenant, je ne peux me résoudre à n’en prendre ne serait-ce qu’un morceau.
Un sourire badin glisse sur ses lèvres, comme au fait. Elle relâche sa cuillère dans la coupe et prend soudainement ma main, sa froideur rendue ainsi par la coupe, un parfait contrepoint à ma chaleur. Puis elle plante son regard vert dans le mien, me clouant sur place.
-Ne t’en fais pas. Même si cela avait un goût des plus horripilants, parce que je sais que tu penses toujours à ce qu’il y a de mieux pour moi, je l’aurais mangé sans hésiter. Que ce soit savoureux n’est qu’un plus. Merci, Vincent, conclut-elle, mon nom une véritable caresse à ses lèvres, ses mots d’une voix douce et sincère en me regardant à travers ses cils comme on confesserait des sentiments ardents.
…Je me fige, impuissant, toute idée d’évasion de la pièce envolée pour toujours. Sa main se détache de la mienne pour reprendre la coupe, prendre un morceau de chair clair entre ses lèvres, son buste se rapprochant ostensiblement du mien.
Bon sang. Si avant notre magnétisme nous faisait régulièrement nous repousser, désormais elle m’invite sans y penser dans son espace vital. Ses yeux turquoises ne demandent qu’à réitérer l’expérience ou en vivre d’autres, une barrière s’étant clairement levée. Par ma faute.
-Allez, tu prendras bien un morceau ? questionne-t-elle avec une jovialité tranquille.
Sa garde est complètement baissée. Son sourire espiègle nullement affecté par le bout proposé entre ses dents et ses yeux directs. Sa confiance est totale. L’envie de partager un simple moment de bonheur en rencontrant juste ces lèvres pulpeuses est tentante.
Puis ma culpabilité me fait l’effet d’un coup de poing. Le souvenir de Lucrécia envahit mon esprit.
-…Angie, je murmure, le souffle court. Je –

Je me recule vivement et la repousse bien assise sur son lit avant que Veld, suivi de Felicia pénètrent dans la pièce. Par chance, Angelina mâchouille déjà comme si de rien n’était avant que quiconque puisse se poser des questions.
-Vincent, me salue-t-il diligemment, toujours bien apprêté dans ses costumes.
-Verdot, je réponds, empruntant un visage neutre.
C’est la première fois qu’il voit Angelina éveillée depuis l’incident. Sa fragilité grandissante, j’ai voulu réduire les possibilités d’une contamination et qu’une parole maladroite la conforte dans l’idée qu’elle ait toutes les raisons de se sacrifier. Je suis pris de court par son apparition dans la chambre. Il tousse pour cacher sa gêne sous mon regard sans équivoque.
-Angelina, Felicia me dit que tu te sens mieux.
-En effet, aussi bien que faire se peut, répond-elle.
-Tu m’en vois soulagé.
-Moi aussi, répond-elle après une courte pause. Merci pour votre sollicitude.
Ses yeux dévient régulièrement, lisant les interactions dans la chambre avec soin. Par politesse, elle s’est arrêtée de manger, dans l’expectative étant donné qu’il ne part pas après ce bref échange. Je le regarde avec attention.
-L’on m’a brièvement expliqué que ton état requiert une quantité d’Énergie astronomique depuis la guérison de Felicia. Je ne suis pas sûr de tout saisir, mais je crois comprendre que nos Rivières te sont nécessaires en cas de coup dur.
Elle acquiesce avec mesure. Le connaissant, je sens déjà où il veut en venir.
-Veld –
Il m’interrompt d’un geste prompt de la main.
-Tout est déjà décidé.
Sur son visage, je lis la même détermination que sa fille. Sous nos yeux interdits, il relâche sa cravate, enlève sa veste et remonte ses manches.
-Si je reste ne serait-ce qu’un jour de plus sans rien faire, je ne trouverai plus jamais la force de regarder ma fille dans les yeux. Angie –
Elle se redresse à son nom, comme moi surprise par le diminutif et la fermeté de son ton, j’imagine. Elle non plus n’est pas rendue sereine par la tournure des évènements. Je réalise…qu’il s’adresse à elle comme il devrait à son âge, mais surtout avec une dureté paternelle qui je crois…ne m’a jamais habité pour Angelina.
Mes mains forment deux poings serrés sur mes jambes. Je ne sais quel terme me qualifie le mieux : défectif, accablant, déficient… Un monstre à visage humain.

-Tout ce que je peux donner, je veux que tu le prennes.
Dans mon esprit, l’aversion grandissante de Chaos pour Veld se fait entendre par un grondement. Un grognement bas, long et menaçant sans équivoque. Il le plaquerait volontiers au sol pour le tuer, pour ne serait-ce avoir suggéré l’idée. Je fais donc attention à surveiller le moindre de mes gestes et humeurs, ralentissant ma respiration et m’assurant qu’il ne puisse, comme toujours, se faufiler à travers aucune faille.
-Hum, Monsieur Verdot, je ne suis pas sûre…que ce soit très prudent.
Mon regard sérieux l’appuie en ce sens.
-Outre le fait que je sois contagieuse, Vincent est celui qui, à ma connaissance jusqu’à ce jour, possède la plus grande quantité d’Énergie. Et même au meilleur de ses capacités, il ne parvient plus à suivre le drain. Il –
-Après plusieurs jours, fait remarquer mon ancien partenaire sans se démonter le moins du monde.
-Hum, oui, en effet, se trouve-t-elle forcée d’admettre, mais –
-Dans ce cas, plus nous serons à te fournir de l’Énergie et répartir la charge, mieux ce sera.
Elle pince les lèvres, très contrariée. Je n’interviens pas pour l’instant, car je sais qu’Angelina ne le laissera jamais faire sans offrir une opposition digne de ce nom.
-Monsieur Verdot –
-Veld. Pour toi jeune fille, c’est Veld. Tu fais partie de la famille, fait-il remarquer sans laisser place à la discussion en désignant Felicia puis moi d’un mouvement vif de la tête.
Elle se retrouve un instant sans voix, l’air traversée par de multiples émotions. Je suis moi aussi stupéfait.
-Veld, commence-t-elle de façon incertaine.
Puis plus hargneuse, remontrant cette fougue qui me fait la reconnaître.
-Altérer la Rivière de la Vie peut s’avérer dangereux. Pour cette raison, je ne me suis jamais permise de m’y essayer avec un être humain normal. Cette Énergie est importante et les humains en produisent peu selon les individus mais elle est essentielle. Vincent a souffert des conséquences du drain de façon importante pendant ma convalescence malgré sa réserve impressionnante.

Je serre les dents.
-C’est donc pour cela, qu’en plus de comporter un risque en tant que malade, je ne m’y essaierai pas. Nous aurons besoin de tout le monde en bonne santé pour sauver Gaïa, sans compter que vous êtes le père de Felicia. Je ne l’ai pas ramenée pour vous condamner.
Le regard brun de Veld se durcit, fer contre acier face Ă  elle.
-Je suis prêt. S’il devait m’arriver malheur, et bien soit. Chaque décision que nous entreprenons a des conséquences.
Puis avec plus d’hésitation.
-Quand Vincent a tout perdu il y a des années, je n’étais pas là.
Il ne pouvait pas savoir. L’expression d’Angelina change, toute ouïe.
-Je n’ai pas pu sauver ma femme. Je n’ai pas pu élever ma fille. Le moins que je puisse faire, est de lui laisser Gaïa comme elle devrait être, et donner toutes les chances de vivre une longue et paisible vie à tous ceux que j’aime.
Il se poste près du lit, l’air intransigeant. Angie en reste coi.
-Je l’admets, je n’étais pas prêt à perdre sa vie.
Angie secoue la tête. En effet, personne ne l’en blâme.
-Elle a toujours été plus courageuse que je ne l’ai jamais été, il l’interrompt. Seulement, j’ai compris plus tard que cela n’aurait été qu’un sursis. Sa longévité, son bonheur passe aussi par toi. Je pense fermement qu’il n’y a pas d’avenir sans toi, ni les autres Cetras. Geostigma n’est pas arrivé sans raison. Geostigma ne s’attaque pas naturellement aux Cetras. Je pense que…c’est un signe que nous devons mériter notre présence sur cette planète.
Je relève la tête. Nous échangeons tous un regard.
-Il est essentiel que nous réussissions à vous préserver envers et contre tout, là où nous, et la Shinra, avons complètement échoué. Nous devons rendre à la planète ce que nous lui avons pris. Donner sans compter comme les Cetras l’ont toujours fait. Agir avec amour là où avant, la haine, la peur et l’égoïsme pétri d’ignorance régissait nos décisions. À ce but, je ne peux pas défaire le passé, mais je peux encore changer l’avenir.
Angie hoche doucement la tête, subjuguée. Elle semble avaler ses mots, prise de réflexion. Felicia sourit doucement pour appuyer ses dires.

-Je tiens Ă  te remercier pour ce que tu as fait.
Veld…toujours égal à lui-même. Comme toujours, il me force le respect, peu importe les années.
-Je tiens aussi à être là pour Vincent cette fois, et sauver aussi la personne qui compte le plus pour lui. Un bel avenir se profile encore devant vous. Qui sait… Peut-être était-ce écrit, vu ta jeunesse persistante.
Je me refuse à y penser. Pas maintenant, pas après Lucrécia et la dernière fois. Je ne fais qu’accumuler les péchés. Il jette un œil à sa fille, posant sa main sur son épaule. Bon sang. Je ne saurais imaginer ce que perdre la mère de mon enfant m’aurait laissé. Je ne puis. Je ne peux déjà me résoudre à perdre ceux qui gravitent autour de moi, et semblent touchés par le malheur quoi que je fasse.
Je ferme les yeux, relâchant silencieusement un souffle de défaite à travers le nez.
-…Tu n’as pas besoin d’en faire tant. Il n’y a rien à pardonner. Tu ne savais rien de ce qu’il se passait. Et concernant Felicia, tu as fait ce que toute personne censée ferait. Ce que moi…j’aurais fait.
Il pose une main sur mon épaule, toute tension entre nous envolée.
-Je le ferais aussi pour toi.
Je détourne ensuite le visage, touché par tant de déférence après toutes ces années et les récents évènements. …Angelina aussi a ces éclairs de sagesse. Un ami est en effet précieux. Angelina nous observe, un sourire impossible à restreindre sur les lèvres.
Après un moment à le toiser, je vois comme moi la jeune fille perdre de sa combativité face à ses déclarations. Je la retrouve donc à tourner son visage vers moi pour me demander mon avis. Veld prend cela pour un signe clair de capitulation avec raison.
Rares sont ceux qui viennent à bout de sa volonté de protéger qui que ce soit, et ce sans heurt qui plus est. Angie…m’a l’air sensiblement changée pour le meilleur déjà. Comme je le pensais, elle évolue à une vitesse vertigineuse à un âge si tendre, mais je salue intérieurement Veld pour sa victoire rapide, songeant que son expérience y est aussi sûrement pour quelque chose.
-Vincent, si tu permets, me demande-t-il avec moins de dureté dans la voix qu’avec elle.
Il se poste devant moi, bien décidé à prendre ma place. En croisant ses yeux, je suis mis au fait qu’aucun refus ne sera accepté.
-…Ce peut être dangereux.
-Je suis au courant des risques. Je les prends en connaissance de cause. Maintenant allez-vous procéder avant que je ne meure de vieillesse.
Peut-être est-il mieux qu’elle me laisse le fin mot. Si les évènements tournent mal, c’est moi qui serai responsable. Angelina n’est pas en mesure d’affronter plus de remords qu’elle n’en a en ce moment.
-…Aucun contact direct, je leur instruis aussi sévèrement que ma fatigue le permet. Et, Angelina…
Elle m’accorde toute son attention, au garde-à-vous. Je lui transmets le message d’une expression que j’espère manifeste. Elle hoche alors la tête en faisant un salut militaire. Un sourire attendri étire les lèvres de Felicia en nous observant.

Malgré mes réserves, je me force à céder ma place, espérant qu’Angelina cette fois efforcera les règles de prudence. La jeune femme brune accompagne son père en se posant près de lui, passe des gants à la jeune fille puis pose une main sur l’épaule de son père. Gaïa…ils nous ont bien piégés.
Veld s’assoit en relâchant un souffle témoignant de sa lassitude.
-Felicia a raison…vous êtes bien trop têtus pour votre bien. J’ose espérer que vous coopérez toujours aussi bien ensemble.
Sa fille s’esclaffe rapidement, à travers son nez, avant de reprendre son air plus réservé que stoïque habituel.
-Ugh, relâche la jeune fille en posant sa coupe sur la table de chevet d’une façon qui trahit son désarroi et son agacement. Parlez-en à lui. Je ne demande que cela, vous savez.
Je lui glisse un regard bien senti sur ce que je pense de celle qui ose dire cela. Veld en rit ouvertement, posant ses mains sur ses jambes décontractées pour les lui présenter.
-Toi, l’interpelle-t-il, j’ai entendu dire que tu avais un caractère bien trempé, pour utiliser un terme poli.
Elle carre les épaules et croise les bras, l’air de prendre cela pour un excellent compliment, un air de défi bien connu sur son visage.
-Heh, fait-elle de façon presque hautaine, son bouclier se mettant en place. Vous pouvez utiliser un terme plus adéquat, j’en ai vu d’autres !
Veld laisse échapper à nouveau un rire, l’air très clairement amusé.
-Non, une seule question : je connais sa patience, et pourtant tu as l’air de le faire réagir si facilement. Dois-je préparer un canapé et m’attendre à des appels à l’aide vers minuit concernant une dispute ?
La jeune fille prend prudemment ses mains dans ses paumes.
-Huh, ça non ! Mais si vous pouviez m’aider à lui expliquer qu’il compte pour nous et qu’il n’est pas seul, vous aurez ma reconnaissance éternelle.
-Je comptais sur toi pour cela, à vrai dire. Ça fait des années déjà que j’essaie, tu sais. Comme tu le vois, sans grand succès.
Angelina m’affiche un air des plus atterrés.
-Tu es désespérant, me lance-t-elle sans atours.
Je hausse les sourcils, détournant les yeux d’un air détaché. L’auditoire rit franchement.

J’entends le grognement feutré de Chaos gagner en puissance à mon esprit, l’air tout à fait piqué par ce qu’il se passe. Je pince les lèvres et l’ignore sciemment comme on claquerait la porte au nez de quelqu’un, ennuyé, priant qu’il quitte également le paillasson au plus vite.
Veld relâche soudainement un long soupir, l’air de se concentrer pour garder contenance mais extenué. Je devine plus que je ne vois le drain, et bien qu’il semble lent et mesuré, Angelina devient de plus en plus réticente. Lorsque Veld relâche un souffle d’effort, la jeune fille retire ses mains.
-Je n’en prendrais pas plus. Un niveau plus bas m’a l’air dangereux. Pensez à bien vous restaurer et dormir.
Elle le détaille avec inquiétude. Veld soupire, l’air insatisfait en faisant en sorte de se redresser.
-Sûr ? Ça n’a pas l’air d’avoir changé grand-chose.
Elle observe brièvement ses mains avant de prendre son temps à formuler une réponse.
-Bien sûr que si. Toute aide m’est précieuse, dans mon état. Seulement…abriter quatre Énergies différentes à la fois est quelque peu déstabilisant. Quoi qu’il en soit, merci infiniment pour votre aide, conclut-elle en s’inclinant.
Felicia s’occupe d’isoler les gants dans un sac hermétique. Je plisse les yeux, pris dans mes réflexions. Veld se lève, aussi dignement que possible.
-De rien, jeune fille. Bien, j’y vais. Vincent, me salue-t-il.
-Merci…Veld.
Je lui tends une main, plein de reconnaissance. Il me la serre sans hésitation, me lançant un léger sourire. Aucune rancœur ne tapit son regard. Je sens mon visage se détendre par mimétisme.
-Je repasserai dès que possible. En attendant, tenez bon, compris ? lance-t-il avec résolution.
-Merci, dit-elle poliment en inclinant la tĂŞte.
-…Repose-toi, je lui demande, un brin soucieux.
-Bien chef.

(Music : Get you the moon de Kina feat. Snow)

Nous l’observons partir, Angelina avec un sourire aux antipodes de ses humeurs négatives récentes. Tout porte à croire que nous sommes enfin sur la pente ascendante.
-Je le raccompagne.
Je hoche la tête, comprenant que je devais redoubler de vigilance si j’étais seul à surveiller Angelina.
-Felicia, je l’appelle avant qu’elle ne parte. …Angelina a raison, aucune activité contraignante après cela. Surveille son état. Qu’il fasse attention à lui.
Elle hoche la tête avant de fermer la porte, son air sérieux m’informant qu’elle avait bien saisi. Pendant que je retourne à ma chaise, Angelina reprend son sundae, maintenant majoritairement fondu. Elle ne se plaint pas de son état, mais a l’air particulièrement pensive.
-…Qu’y a-t-il ? je questionne.
-Rien, je…
Elle cligne des yeux, l’air de chercher ses mots.
-Je réalise simplement que…toutes les Énergies ne se valent pas. Elle ne semble…étrangement pas compatible avec celle de Chaos, répond-elle en me glissant brièvement un regard. Comme si…elle n’appréciait pas l’intrusion. Mais j’en ai besoin. Alors je l’ai absorbée avec la mienne que cela lui plaise ou non.
Elle me toise.
-Seulement, je préfère de loin ton Énergie.
Je ne suis pas censé être spécialement touché par cette admission.
-Je n’ai pas osé lui dire que tu offres une quantité non seulement bien supérieure mais sa qualité est sans pareille. Elle regorge de magie et de puissance. Elle a…comme un goût. Son identité me plaît sincèrement.
Ses yeux me parcourent, comme ils le font souvent quand elle sonde mon Énergie.
-Dernièrement, elle a pris une saveur particulièrement féroce.
Alors…elle peut même sentir ces fluctuations entre Chaos et moi, quel que soit son état.
-…Si elle cesse de t’être bénéfique alors –
-Non, m’interrompt-elle aussitôt en posant une main sur mon épaule. Non, elle est superbe. Très abreuvante. Seulement…

Elle finit son sundae, n’en laissant presque rien, ses yeux fixés sur les gouttes perlant à sa surface plus fraîche que l’air ambiant.
-Je me dis que si j’ai réussi à guérir Elfé en une fois, tout porte à penser que l’Énergie d’un Cetra serait la plus qualitative. De ce fait, je me demande comment il subsiste sans quelqu’un comme toi. Et surtout…
Elle pince les lèvres, l’air aussi anxieuse qu’attristée.
-Si je le connais, et… Ce qu’il attend pour agir.
Je songe aussitôt à ces cheveux blonds que j’ai dans la sacoche, et ces odeurs que je ne sais comment interpréter. Je manque trop d’information pour lui avancer quoi que ce soit mais je partage sa peine.
-…Je l’ignore, Angie. Sache simplement…
Je l’attire doucement vers moi. Elle se love sans retenue contre mon torse, mon bras autour d’elle. Je l’enlace délicatement, espérant l’apaiser. Lorsqu’elle soulève son visage vers moi, j’ai un léger mouvement de recul. L’air de s’y être attendue, elle repose sa tête sur moi, son corps crispé entre mes mains et les traits tendus.
-Que tu pourras toujours compter sur nous, je termine.
Sur moi.
Elle se détache sans heurt de moi, son visage complètement vidé de toute expression, le regard droit et fixe. Mon souffle anxieux balayant doucement quelques cheveux à sa pommette. Leur ressemblance me frappe à nouveau. L’envie de lui demander de me pardonner m’envahit, puis je me souviens, comme on se lacère, que je ne peux pas faillir avant qu’elle ne soit complètement hors de danger.
-…Angie. Je le trouverai.
Sois en certaine. Si je ne peux pas te sauver, tu peux être sûre que je trouverai la personne qui le fera. Dusse-t-il s’appeler Chaos.

Je range une mèche de cheveux derrière son oreille avant de me forcer à m’éloigner. Avec une dose d’amertume que je ne m’attendais jamais à voir ni entendre d’elle, elle lâche avec une certitude absolue, posant des yeux perçants sur moi :
-Je sais.
…Qui suis-je, si ce n’est ce monstre qui détruit chaque pont qu’elle crée entre nous. Elle qui a tant manqué de ce que nous considérons acquis depuis la naissance. Je porte l’altruisme comme un masque, lui faisant croire que j’agis toujours pour le mieux, quand je n’apprends jamais de mes erreurs. Le fait est que je m’attarde sur cette terre sans jamais parvenir à la mériter.

Fin du Chapitre-23
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Bloopers :

~Ils piochent tous. Le cœur de DG bat littéralement la chamade.
-Celui ou celle qui annoncera à Ive tout ce qui arrive d’explicite à Angie, chuchote-t-elle.
Tous les visages pâlissent, à l’exception de Tifa, qui se retient déjà de rire. Car le malchanceux est…

1.
-Reeve ! s’exclame Angelina, pleine d’empathie pour le pauvre homme.
Ce dernier a l’air à deux doigts de s’effondrer au sol, hurlant de désespoir comme un crapaud en mal d’amour un soir de pluie. Seul son visage blême reflète ses sentiments intérieurs, cependant. C’est livide que DG le pousse, ses pieds faisant office de frein, vers Ive qui attend impatiemment, les mains croisées.
Reeve toussote.
-M-Madame.
Elle le considère, peu impressionnée.
-Angelina. Je crois que l’on devrait partir.
-Comment, maintenant ?
-Maintenant, assure-t-il en s’emparant de son poignet.
Reeve tousse à nouveau. Tous l’observent, dans l’expectative.
-Madame, outre le fait de…devoir signaler combien vous êtes ravissante, je me dois de…
Sa voix meurt lorsque cette fois, Ive le détaille avec attention, radoucie, le considérant entre ses cils.
-Reeve, est-ce cela ?
-O-oui, Madame, dit-il en ressentant le besoin impérieux de s’incliner.
-Bien. Poursuivez.
Reeve cesse de fonctionner, raide comme un piquet, les bras bien droits à ses flancs. Tout le monde se tape le front, excepté pour Vincent, qui a la respiration en suspens, prêt à décoller. Il cligne des yeux, l’air de ne plus savoir où il se trouve.
-Auriez-vous oublié la raison de votre apostrophe ?
-Je…
Il semble qu’il ait même oublié comment respirer.
-Venez. Allons discuter autour d’une collation. Sûrement cela vous reviendra.
-O-oui ! Madame, lance-t-il plein d’entrain, se postant à ses côtés pour lui présenter son bras. Je connais un endroit charmant que mes parents affectionnent particulièrement…
Ive lui glisse un léger sourire avenant.
Ils s’en vont sous le regard horrifié d’Angelina, et l’auditoire soufflé.
-Et bien voilà un dénouement auquel je ne m’attendais pas, commente Elfé.
Tifa émet une exclamation d’incrédulité.
-Comment Reeve y parvient sans mal, et dans la même équipe il y a Cloud et Vincent ! s’exclame-t-elle en les désignant, au comble du désarroi.
-C’est officiel, Cloud et Vincent seulement trônent au sommet de ce fameux royaume qu’est l’imbécilité pavé d’abstinence superflue, DG renchérit.

2.
-Vincent ! Oh-oh, commente Angelina.
Vincent considère une seconde sa gouvernante et son air implacable, le blanc de son visage se confondant parfaitement avec celui d’un cachet d’aspirine tant il devient blême. Avant de se transformer en cape volante et s’enfuir sans demander son reste. Les filles émettent des exclamations choquées.
-Vincent ! Comment oses-tu ? Ive est comme une mère pour elle !
Si ce n’était pour le pouvoir du script conféré à DG, il aurait fui comme un digne robinet (merci Eclipse). Le maintenant par la cape, DG le plante devant Ive, qui le détaille avec curiosité. Angelina s’approche de quelques pas, inquiète. Le vampire semble prêt à se liquéfier de terreur sur place.
-…Sa mère ?
Angelina hoche doucement la tĂŞte avec certitude, croisant les bras et haussant les sourcils devant son attitude frileuse.
-…M-Madame.
Il s’incline nerveusement. Prenant le jeune homme en pitié, la gouvernante plie rapidement les genoux pour présenter sa révérence, abordant un visage attentif et moins sévère.
-…
-…
La respiration du tireur est chaotique. Prenant une inspiration, il s’agenouille soudainement.
-Accordez-moi sa main, sort-il tout de go.
Tout le monde émet une exclamation de choc. Angelina s’évanouirait raide au sol de stupéfaction si ce n’était pour les réflexes de Vincent, toujours aux aguets pour la jeune fille, pendant que Tifa s’égosille de joie en secouant Cloud.

3. Bonus pour Eclipse (et parce que c’était trop amusant à écrire).
-Cloud ! Ugh, oh non…
La nervosité et l’ennui d’Angelina sont visibles sur son visage. Cloud garde un visage impassible, blasé au possible, avant de relâcher un souffle incrédule en secouant lentement la tête. Toujours affublé de son visage apathique et dédaigneux, il s’avance vers la femme, qui lui renvoie son air condescendant.
-Angelina. Je crois que l’on devrait partir.
-Comment, maintenant ?
-Maintenant, assure-t-il en s’emparant de son poignet.
Cloud se plante devant la gouvernante, la regardant dans les yeux. Il lève une main. « Vincent. » L’autre. « Votre gâtée pourrie. » Avant de rentrer son index dans un cercle sans sommation ni cérémonie.
Ni une, ni deux, la baffe d’Ive l’envoie au sol. Elle avise à peine la mâchoire décrochée de tout le monde pour retrousser ses manches et sa robe et fondre sur celui qui tient sa précieuse fille.
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Hello les gens.
J’ai CRU que le chapitre-21 était dur. Mais ce n’était encore rien face au 23 ! Alors que j’avais beaucoup avancé d’une traite pendant le confinement, cette année 2020 de merde et les évènements de ma vie récents ont rendu ce chapitre une vraie plaie.
Je n’en suis pas satisfaite. Je voulais faire beaucoup de choses, beaucoup de choses devaient être dites, des questions répondues. Mais je crains d’avoir été en-dessous ce que je voulais faire, où ne serait-ce ce qui aurait dû être fait vu ce que la tournure de l’histoire exigeait.
Mais une chose est sûre, il a été écrit avec mes tripes. Peut-être est-ce parce qu’il est très personnel. Il m’a réellement demandé, taxé de ma personne. Écrire les combats et la romance à côté ont étés d’une facilité déconcertante. J’ai vraiment eu l’impression de me lire moi plutôt que mes personnages et cela faisait très longtemps que ce n’était pas arrivé. Je suis bourrée d’insécurité quant à la réception.
Peut-être parce que c’est une partie de moi que je présente directement cette fois. Quoi qu’il en soit. C’est fait. Je reviendrai dessus si le besoin se fait sentir. Mais j’ai décidé de l’accepter comme étant le résultat de ma personne pour l’instant. Et je suis comme je suis.
Quant Ă  vous, je vous fais de gros bisous, et prenez soin de vous.